Si tu le veux, tu peux me purifier (6ème dimanche ordinaire – Année B) Texte 1 = Lv 13, 1-2. 45-46 : Sa demeure sera hors du camp Ce passage du Lévitique est une partie du grand ensemble qui traite du « pur et de l’impur.» (Lv ch.11-16) La présentation faite au v2 n’est pas réellement une description de la lèpre, mais plutôt quelques indications pour inviter à porter une attention spéciale à toute altération de la peau qui pourrait ressembler à de la lèpre. S’il y avait une certaine certitude à propos de la lèpre, le malade ainsi diagnostiqué devait être présenté au prêtre. Par la suite, il doit se comporter comme un homme en deuil, et, partout où il passe, il doit crier « impur, impur.» (vv2 et 45) C’est une maladie qui excluait le lépreux de sa communauté. Il devait habiter à l’écart, et sa demeure devait être hors du camp (v46). C’était une situation vraiment pénible, qui nous fait mieux comprendre l’évangile et la situation d’exclusion de nos malades aujourd’hui. Texte 2 = Ps 101, 1-3a. 4-6. 13. 20-21 : Seigneur, écoute ma prière Nous avons ici la prière d’un malheureux qui crie ver son Dieu. Il le supplie d’écouter sa prière (vv2-3). C’est peut-être la parole qui résume tout ce psaume et qui sera reprise, mais dans un autre contexte, au v21. Comme pour exciter la pitié de son Seigneur, il décrit sa situation. Il est vraiment malade dans son corps. Il n’arrive même plus à manger. A force de gémir, il a maigri et n’a plus que « la peau sur les os.» (vv4-6) Vers la fin, il compare sa situation à celle du Seigneur qui, lui, siège pour toujours. Heureusement qu’il n’est pas indifférent, puisque qu’il se penche du haut de son sanctuaire, regarde la terre pour écouter les gémissements des prisonniers et relâcher les condamnés à mort.»(vv13. 20. 21) Noter que de personnelle, d’individuelle, la prière se dilate pour embrasser tous ceux qui souffrent, tels que les prisonniers et les condamnés à mort. Ce qu’il a déjà réalisé, il peut encore le réaliser aujourd’hui, et pour moi, et aussi pour nous. Il n’oublie personne. Texte 3 = Quoi que vous fassiez, faites tout pout la gloire de Dieu Comme il sait bien le faire, l’apôtre Paul présente de manière synthétique l’activité globale de la vie du chrétien : manger, boire, travailler, tout doit se faire pour la gloire de Dieu. Ceci rejoint un autre passage : « Soyez toujours dans la joie ; priez sans cesse, rendez grâce en toute circonstance.» (1Th 5, 16-18) Dans la deuxième partie, il met en garde contre le scandale, qui peut toucher n’importe qui, qu’il soit Juif, Grec ou membre de l’Eglise de Dieu. C’est une invitation à faire attention à tout le monde. Et enfin, l’apôtre Paul dit que ce qu’il demande aux Corinthiens, « tout faire pour la gloire de Dieu et éviter le scandale », lui-même le met en pratique. Il ne cherche pas, de manière égoïste, son avantage, mais celui du plus grand nombre, afin qu’ils soient sauvés. C’est cela l’objectif : le salut du plus grand nombre. Aux Corinthiens comme à nous aujourd’hui, l’apôtre Paul demande de l’imiter (v33 et ch ;11, 1). Texte 4 = Mc 1, 40-45 : Si tu le veux, tu peux me purifier Notre chemin est semé d’embûches et d’épreuves de toutes sortes, parmi lesquelles la maladie. Pour le croyant, sûr de la victoire, parce qu’il est en communion avec Jésus mort et ressuscité, tout est grâce et occasion d’action de grâce. Le lépreux de l’évangile était condamné à se cacher et à rester loin de sa communauté. Il était considéré comme un danger parce qu’il pouvait contaminer d’autres personnes. Il lui était donc interdit de s’approcher de qui que ce soit. Or voilà qu’il s’approche de Jésus (cf. v40a) : il brave un interdit, la loi de Moïse (cf. Lv 13). A ce geste audacieux et courageux s’ajoutent les faits suivants : il supplie Jésus, s’agenouille et parle : « Si tu le VEUX, tu PEUX me purifier.» (v40) Ces paroles sont un modèle de la prière chrétienne par sa brièveté, par sa profondeur et par sa structure. Elle n’est pas longue et se contente de l’essentiel. Elle rejoint la profondeur théologique du « Notre Père » (cf. Mt 6, 10) et de la prière du mont des Oliviers ( Lc 22, 42). La première partie est une affirmation de primauté et de la liberté souveraine de Dieu : Si tu le veux. La deuxième partie est l’expression claire, mais humble de ce que veut le malade, s’appuyant sur la puissance de Dieu qui est capable de réaliser l’impossible (cf. Lc 1, 37). Cette prière n’impose rien à Jésus. La réaction de Jésus aurait été de lui dire de s’éloigner. Au contraire, il se laisse « émouvoir », une expression forte qui exprime la compassion de Jésus devant celui qui souffre, devant celui qui est dans le besoin, come en Mt 9, 36. Il étend la main et, à son tour, il fait ce qu’interdisait la loi de Moïse : « il le touche » et lui parle : « je le VEUX, SOIS PURIFIE ». C’est un des rares passages du Nouveau Testament où Jésus répond à un homme en reprenant, presque mot pour mot, les paroles de cet homme. Il ne reprend pas ce qui est évident pour Dieu, c’est-à-dire sa toute puissance, mais uniquement ce qui est nécessaire pour la circonstance, la volonté de purifier ce malade. Notons bien que le texte ne parle pas de « guérir », mais de « purifier », qui laisse entendre une réalité beaucoup plus profonde, beaucoup plus complète, beaucoup plus globale, englobant aussi bien le physique que le spirituel. Le mot revient trois fois : « tu peux me purifier », « sois purifié », « il fut purifié » (vv40. 41. 42). C’est vraiment la joie. Et pourtant, la suite est surprenante : Jésus s’irrite et le renvoie aussitôt. On pourrait se poser des questions sur cette « colère » de Jésus. Et l’explication n’est pas facile. Mais on pourrait supposer un blâme de la part de Jésus, parce que cet homme, conformément à la loi de Moïse, aurait dû se tenir à l’écart. De toutes les façons, malgré cela, il l’a tout de même purifié. Mais il lui demande d’obéir au moins à la deuxième recommandation de la loi : « se présenter au prêtre et offrir pour la purification ce que Moïse a prescrit. Ils auront là un témoignage » (vv43-44). Ce point, pourtant important pour la mission de Jésus, ne sera pas respecté. Cet homme « purifié », réconcilié avec lui-même et avec sa communauté, au lieu d’obéir à ce que Jésus a ordonné, va et fait ce qu’il veut : « proclamer et répandre la nouvelle.» Résultat, Jésus est obligé de rester dehors en des endroits déserts. Mais de partout, on vient à lui (v45). Conclusion générale : la présence de Jésus au milieu de nous est un acte d’amour : amour pour son Père et amour pour nous. Cet amour, il le montre en nous présentant le Royaume de son Père, dans lequel il nous invite à entrer ensemble avec lui, en suivant bien son enseignement basé sur l’amour de Dieu et du prochain, sans discrimination. Pour donner force à son enseignement, il opère des miracles, redonnant ainsi leur liberté de communion, d’expression et d’action, aux hommes affligés, exclus, maltraités, marginalisés par toutes sortes de situations. Ainsi, ils peuvent se mettre au service de Dieu et de leurs frères et sœurs, comme la belle-mère de Pierre. A tous, ainsi qu’à nous, Jésus demande de suivre son exemple : ne jamais rien imposer à Dieu, mais le prier avec insistance, avec confiance et respect comme le fait le lépreux dans l’évangile. Notre prière peut seulement proposer, mais ne peut et ne doit jamais imposer à Dieu ce qu’il doit faire. Et Dieu, dans son amour et sa puissance, fera ce qui est bon pour nous, selon sa volonté. Purifions donc notre façon de prier. Mgr Bernard NSAYI Evêque émérite de Nkayi
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