Vivre le ministère presbytéral dans l’humilité En décrétant une année sacerdotale, le Souverain Pontife, Benoît XVI, invite les prêtres de tout l’univers à la profonde et grave obligation de vivre l’humilité dans l’exercice du ministère. C’est par pure grâce, en effet, que le Christ habilite le prêtre à l’offrande des sacrifices (Cf. I Pierre 3,18). Cette gratuité, reçue du Fils de l’Homme, fait du prêtre dans l’Eglise, « le ministre des actions salvifiques essentielles ». La méditation sur l’humilité, qui est une attitude de vérité devant Dieu, devant l’Eglise et devant le prochain, s’impose surtout en cette année de grâces du prêtre. L’humilité est une disposition fondamentale pour la fécondité du ministère presbytéral. Le Christ, source du sacerdoce, enseigne à ses ministres d’apprendre de lui, non pas l’accomplissement des miracles, mais à être comme lui : « …doux et humble de cœur » (Mt 11,29). Le vrai don que le Christ fait au prêtre se vérifie dans la fidélité d’être à sa suite sur les sentiers de l’humilité. L’imitation du Christ, par le prêtre, authentifie, régénère et cimente profondément le ministère presbytéral. C’est le chemin de l’humilité qui dispose le prêtre à intérioriser le Testament du Christ. Comme l’a signifié - avec beaucoup de profondeur - l’Abbé Huvelin, accompagnateur spirituel du Bienheureux Charles De Foucauld, le presbytérat réside tout entier dans l’humilité aimante et fervente. Pour vivre l’humilité dans les profondeurs, le prêtre est tenu de se mettre en présence du Christ, le contempler et l’adorer. L’humilité fervente, qui met le prêtre à l’abri des ravages de l’orgueil spirituel, se vit en trois trajectoires : une trajectoire sacramentelle, une trajectoire missionnaire et une trajectoire de communion. 1- Une trajectoire sacramentelle : le presbytérat et l’épiscopat Dans son enseignement, le Concile Vatican II insiste sur la centralité de la sacramentalité de l’épiscopat, et sur la collégialité. La consécration épiscopale ne doit pas être considérée comme « le grade suprême » de l’Ordre. L’épiscopat n’est pas un terme auquel se préparent les « grades inférieurs », comme le diaconat et le presbytérat, mais « cette consécration épiscopale confère la plénitude du sacrement de l’Ordre ». Ainsi, le presbytérat est la participation à la plénitude du sacrement de l’Ordre. Cette référence à l’épiscopat est intrinsèque et non juxtaposée. C’est dire que la spiritualité presbytérale est foncièrement liée à la spiritualité épiscopale. Une théologie du presbytérat, développée à la lumière de l’épiscopat, se révèle féconde car elle aide efficacement le prêtre à résister à la tentation de l’isolement, de l’individualisme. Elle met en lumière une communion épiscopat-presbytérat, cette dernière étant une exigence ecclésiale dans laquelle doit se vérifier l’humilité. En cette année sacerdotale, cette trajectoire devrait être vécue intensément, pour la construction d’une Eglise-Famille de Dieu, telle que l’a recommandée la première Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Evêques, tenue à Rome il y a plus de dix ans. 2- Une trajectoire missionnaire : la consécration et la mission Le lien entre la spiritualité sacerdotale et la spiritualité épiscopale est fondamental. Il est aussi important de souligner que la spiritualité presbytérale s’exprime dans le ministère, dans la mesure où elle naît de cette connexion entre la consécration et la mission. En effet, Jésus est le Christ, l’Oint, le Consacré et l’Envoyé. La consécration est conférée en vue de la mission, et elle constitue « la première source de l’autorité et de la mission pastorale ». Sur le plan existentiel, il y a le dépassement de l’idée qui définit la figure de l’épiscopat uniquement en fonction de la juridiction. De ce dépassement, naissent des riches perspectives théologiques, spirituelles et ecclésiologiques. Le Concile Vatican II, en effet, se situe dans la ligne du dépassement d’un rapport évêque-prêtre, conçu en termes uniquement juridictionnels. Pour le Concile, il y a un rapport plus vital et complet. Il n’est pas possible de séparer la consécration de la mission. Car, avec la consécration, le prêtre célèbre sa participation au sacerdoce du Christ. Cette configuration au Christ implique la radicale exigence de vivre les profondeurs de l’humilité. Vivre les profondeurs de l’humilité, enseigne Emile Cardinal Biayenda, « ce n’est pas uniquement une privation, mais aussi et principalement un contrat d’Amour ». La promptitude à la renonciation, le "prendre la croix," le "vivre l’humilité" sont là des conditions vitales pour l’authenticité du ministère presbytéral. Cette Année sacerdotale est une riche occasion pour redécouvrir et vivre ce qui solidifie l’essentiel du ministère sacerdotal. 3- Une trajectoire de communion : communion, collégialité et amitié Avec l’explosion de l’interdépendance planétaire, nous constatons, dans notre monde d’aujourd’hui, l’émergence des valeurs communautaires dans la vie civile, économique et sociale. C’est « la naissance d’un nouvel humanisme ; l’homme se définit avant tout par la responsabilité qu’il assume envers ses frères et devant l’histoire ». Le Concile Vatican II renonce à considérer le prêtre par lui-même, mais l’insère plutôt dans un tissu de communion vitale. Le prêtre est compris dans une spiritualité presbytérale de communion, dans une vie de fraternité sacramentelle et dans l’amitié. La catégorie de communion décrit mieux la spécificité du ministère ecclésial. Le sacrement de l’Ordre donne au prêtre, non seulement la mission d’édifier le Peuple de Dieu par le ministère de la Parole et de la célébration de l’Eucharistie, mais aussi la mission de manifester, de façon unique et sacramentelle, l’amour fraternel. En cette Année sacerdotale, le prêtre pourrait expérimenter la fécondité de vivre la profonde communion avec toute l’Eglise universelle et locale (communion évêques-prêtres-laïcs). C’est dire que le prêtre n’est pas un individu isolé, ayant pour soi un ministère particulier. Le prêtre est inscrit dans un corps sacerdotal, qui aide l’évêque dans sa mission de guider le Peuple de Dieu. Pour mieux vivre l’Année sacerdotale, qui est une année de grâces, le prêtre cherchera, de façon permanente, à vivre dans l’humilité aimante et fervente, pour être, dans l’Eglise et dans la société, « une vive flamme d’amour », selon l’expression de saint Jean de la Croix. Abbé Gustave MAKAYA Directeur du Séminaire de Loango (Pointe-Noire) Professeur visiteur au Grand Séminaire E. Biayenda
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