Aimer comme le Christ Jésus a aimé (5ème Dimanche de Pâques – Année C) Textes : Ac14, 21b-27 ; Ps 144 (145) ; Ap21, 1-5a ; Jn13, 31-33a. 34-35 La parole de ce dimanche nous fait entrer au cœur de la mystique chrétienne qui est l’imitation de Jésus dans ce qu’il apporte comme nouveauté à l’humanité : le seul et véritable chemin de réalisation de soi et d’accomplissement pour le monde est l’amour. Jésus donne à ses disciples « un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. » Tout d’abord, aimer est-il une injonction, un ordre ? N’est-ce pas un élan du cœur qui vient de ce fait du plus profond de nous-mêmes et non pas une contrainte légale ? Pourquoi l’évangile parle-t-il alors de commandement ? Il faut ici prendre le mot « commandement » au sens de « parole » comme les dix paroles que Dieu donne à Moïse pour les enfants d’Israël au mont Sinaï. Paroles de vie qui respectent la liberté des hommes en même temps qu’elles leur indiquent le chemin de la vie et du bonheur (Dt30, 15ss). Simon-Pierre réalisera après un long temps à la suite de Jésus que celui-ci seul a les paroles de la vie éternelle et qu’il est Dieu. A la manière de Dieu le Père, Jésus n’impose pas une loi, il dit une parole dont l’Esprit permettra aux disciples de saisir la richesse de telle sorte qu’aimer ne sera jamais une obligation légale mais la manière la plus authentique d’être enfants de Dieu, frères et sœurs de Jésus : « Ma mère et mes frères ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et la mettent en pratique. » (Lc8, 21). Jésus parle de nouveauté au sujet de cette parole de vie qu’il donne à ses disciples ; mais qu’y a-t-il de vraiment nouveau comme si avant lui et en dehors de lui les hommes n’étaient pas capables de s’aimer ? Je ne dis pas qu’avant la venue de Jésus les êtres humains ne s’aimaient pas. Cependant, de la même manière qu’il n’est pas venu abolir la Loi mais la parfaire, Jésus ne vient pas abolir nos façons d’aimer mais il nous convie à être parfaits comme le Père céleste et lui sont parfaits. La perfection dans l’amour consiste, en effet, à se mettre à l’école du Christ : « Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. » Invitation pressante et toujours actuelle à contempler Jésus dans la profondeur de l’amour qu’il porte à chacune des personnes qu’il rencontre, sans discrimination d’aucune sorte ; ceux qui sont marginalisés ou méprisés trouvent auprès de lui un accueil qui les relève et leur fait découvrir qu’ils ont du prix aux yeux de Dieu : le petit enfant, le lépreux, le publicain, la femme adultère... sont les amis de Jésus ; les pharisiens et même les disciples sont scandalisés par cette proximité aimante de Jésus pour ceux que la Loi tient loin de Dieu. Nos critères humains de l’amour que l’on porte à ceux qui nous ressemblent ou qui nous aiment sont dépoussiérés par le Christ qui va jusqu’à nous demander d’aimer nos ennemis : « Aimez vos ennemis et priez pour vos persécuteurs, afin de devenir les enfants de votre Père qui est aux cieux... Car si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ?...Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ?...Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. » (Mt5, 44ss). Ce que Jésus demande à ses disciples, il le fait lui-même d’une manière absolue lorsqu’il accepte librement de donner sa vie sur la croix pour le salut des hommes esclaves de la mort et du péché. Ce que Jésus demande à ses disciples, il le fait lui-même d’une manière absolue lorsqu’en croix, il ne manifeste aucune haine envers ses bourreaux, mais au contraire, il prie pour eux. Aimer comme Jésus pour être le frère et la sœur de celui que je rencontre ou que je côtoie, c’est le cœur de toute vie chrétienne et la spécificité du christianisme. Celui qui vit cela accomplit toute la Loi. Nos exercices cultuels et spirituels, nos célébrations dominicales n’ont de la vérité que s’ils baignent dans les eaux de cet amour qui fait de nous des êtres nouveaux, participant déjà ici-bas à la vie de ce ciel nouveau et de cette terre nouvelle que chante l’Apocalypse de saint Jean. L’Eglise ne peut être l’épouse fidèle du Christ, témoignant de son amour pour tout être humain, que si les chrétiens s’aiment entre eux et portent cet amour, au-delà de la communauté, à tout être humain que Dieu met sur leur route comme le bon samaritain qui se penche sur l’inconnu blessé. Vivre en aimant comme Jésus m’aime, c’est accepter de mourir à moi-même, refuser de rechercher mes propres aises pour me décider à vouloir que l’autre grandisse ; Jésus m’aide alors à purifier ce mouvement de mon cœur que je nomme improprement amour alors qu’il n’est que manipulation de l’autre pour ma propre satisfaction et mon propre intérêt. Qui peut suivre Jésus sur ce chemin escarpé et resserré sinon celui qui demande sans cesse au Père de lui donner l’Esprit qui fait de nous des êtres nouveaux dans les eaux du baptême de renaissance ? Abbé Olivier MASSAMBA-LOUBELO
|