Voici que la vierge enfantera un fils (4 ème Dimanche de l’Avent - Année A) Textes : Is7, 10-14; Ps 24 ; Rm1, 1-7 ; Mt 1, 18-24.
Le Noël usurpé de Santa Clauss Un Grand Shop de Kanka City, spécialisé pour les produits menagers, intitulait sa vente du troisième Dimanche de l’Avent : bientôt Noël! Peu après, Noël était venu. La plaque de vente n’avait pas encore été changée. L’intervention des travailleurs que le patron menait au doigt et à l’oeil n’en vint point à bout. C’est le patron qui décidait à quelle heure Noël serait venu. Se fichant éperdument du tralala, son attention était sur le profit à en tirer. En fait, Noël était bel et bien célébré à Kanka City. Mais, c’était le Noël de Santa Clauss, ou simplement dénommé Father Christmas, Kris Kringle, Père Noël. Au fil du temps, ce Noël avait évincé et défait la tradition de la crèche, des bergers, de Marie et Joseph et, pis encore, celle de l’enfant Jésus. Le petit Jésus était désormais en compétition. Il ne faisait plus le poids devant le Gros Bonhomme barbu, au rire hilare, habillé en rouge et blanc, distribuant de petits gadgets aux bambins, et quémandant par-ci par là un pourboire pour la journée. Noël à Kanka City sera peut-être aussi le nôtre. Nous aurons vite oublié, avant le jour « J » le sens de cette fête. L’euphorie de la grande réjouissance sera au rendez-vous. Mais ce sera tout. Pourtant rien n’est perdu, si nous nous efforçons de discerner les signes et le signe de Noël. Des signes par milliers à l’approche de Noël Des signes de Noël, nous en avons à foison. Juste un regard nous fera percevoir des personnes qui ne gouteront peut-être pas les joies de cette fête. Un enfant malade à l’hopital regarde avec tristesse les fêtards marchant à la queue leu leu et criant à tue-tête. Un ménage manque de strict minimum. Un autre se fait cambriolé le peu qu’il avait pour vivre. Un père à la retraite espère en vain deux mois de salaire impayés parce qu’un bougre s’est servi copieusement dans la caisse publique. Une mère tente sans succès de vendre quelques fagots de bois au marché pour nourrir sa nombreuse progéniture. Des enfants de la rue glanent désespérément, des heures durant, les poubelles, à la recherche d’une curiosité comestible. Au coin sombre des rues, ce sont les desesperados des villes qui devront se partager quelques haricots à moitié avariés qu’un commerçant avare et goguenard a oubliés dans sa compabilité. Dans l’icognito des grands bâtiments lugubres, ce sont des prisonniers qui attendront un moment d’attendrissement qui ne viendra jamais. Un étranger hésite à faire le pas de se joindre à la joie des autres, se contentant de longer les couloirs en solitaire. Toute une population entière, enlisée dans la peur, se terre chez elle à cause de l’insécurité. La liste est longue. Mais elle peut s’arrêter si nous demandons un signe spécial et accueillons la vie qu’il porte. Alors Noël aura une signification particulière; il ne ne sera plus ce temps des oubliés mais la fête d’un Dieu solidaire de tous. Un signe spécial : la vierge enfantera un fils Ce signe spécial de Noël nous vient de loin : voici que la vierge va enfanter un fils (Is 7, 14). La première lecture nous renvoie à près de 2800 ans en arrière. Au 8ème siècle avant Jésus Christ, le prophète Isaïe, exaspéré par la foi chancellante d’Achaz, roi de Juda, lui fait dire de la part de Yahvé qu’il a le droit de demander un signe. Ce signe, en principe, devrait affermir sa confiance en Yahvé plutôt qu’en la force militaire des alliances. Devant la menace assyrienne, Isaïe recommande au roi de naviguer à contre-courant des forces politiques. Mais Achaz n’écoute pas. Ses calculs trop humains finissent par plonger le pays dans le chaos. Quelque temps après, en 721, le royaume de Samarie est assujéti sous le joug de Salmanasar, nouveau roi d’Assyrie. Ce fils attendu qui porte le nom de Jésus Christ Le signe de la vierge qui enfante a fait son chemin dans la conscience messianique d’Israël. Lorsque les évangiles de l’enfance mettent en forme le récit de la nativité, le texte d’Isaïe fait aisément figure d’accomplissement des Écritures. Mathieu s’y réfère dans la péricope que nous propose la liturgie : Mt 1, 18-24. Il y a plus. Autant le récit de Mathieu conserve un fond fantastique, autant il nous ramène à cette vérité essentielle que Paul résume à l’excellence dans la deuxième lecture : le messie est issu de la lignée de David selon la chair et établi Fils de Dieu selon l’esprit de sainteté (Rm 1, 3-4). Conçu de l’Esprit- Saint, le Christ Jésus est de condition humaine et divine. Mathieu l’atteste en forgeant une intrigue. D’une part, il souligne la contribution de l’Esprit-Saint et de l’ange. De sorte, la naissance de Jésus est autant la plus normale d’une conception humaine et autant la plus étrange d’une conception sous la puissance de l’Esprit-Saint. D’autre part, Mathieu rapporte les faits de l’inconcevable naissance en élevant à un degré sublime la foi de Joseph, l’homme juste, et le fiat de Marie, la servante du Seigneur. Tout ceci révèle la conviction décisive du narrateur. Celle-ci transpire au fil de la lecture: Dieu est maître de son plan d’amour. Quels messages nous livrent ces textes? Les textes de ce jour sont un affermissement de foi et une mise en garde contre la distraction. 1-Un affermissement de foi Nous connaissons désormais celui que nous allons accueillir à Noël : le Fils de Marie, né de la lignée de David selon la chair et Fils de Dieu conçu de l’Esprit-Saint. Autrement dit, ce 4ème Dimanche de l’Avent dessille en nos coeurs le credo des Apôtres que chacun fera sien. Disons que la fête de Noël nous fait entrer dans un chaînon multiséculaire de foi. 2- Une mise en garde La fête de Noël apporte avec elle une multiplicité de signes. L’âme bien préparée se fera le devoir de discerner les signes qui font perdre de vue l’essentiel des signes qui fixent le regard sur l’Emmanuel : Dieu-avec nous. Nous avons raison de dire que cette fête a atteint aujourd’hui des proportions universelles. Mais, en même temps, nous devons nous prononcer face au danger d’une culture christmatiale sans Christ. A bien voir, la conscience chrétienne gagnera en redonnant à Jésus sa fête avant d’en tirer toutes les implications possibles. C’est d’ailleurs à cette exigence que le signe de l’Emmanuel nous rejoint dans notre humanité profonde, multiforme et diversifiée. Abbé Luc Augustin SAMBA
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