L’amour de Dieu et du prochain : l’essentiel de l’essentiel (30ème Dimanche du temps ordinaire – Année A) Textes : Ex 22, 20-26 ; Ps 18 ; 1Thess. 1, 5-10 ; Mt 22, 34-40 La liturgie de la Parole de ce dimanche nous révèle « l’essentiel de l’essentiel » des préceptes divins, à savoir le double amour de Dieu et du prochain. Cette révélation du Christ est au-dessus de toutes les considérations contenues dans l’Écriture, dans la Loi et les Prophètes. Elle en est, en quelque sorte, l’accomplissement réel et la substance vivante et vraie. La première lecture, extraite du livre de l'Exode, dresse les contours de cet amour, un amour témoigné de façon concrète dans les relations entre les personnes : il doit s'agir de relations fondées sur le respect, la collaboration et l'aide généreuse. Le prochain à aimer est également l'étranger, l'orphelin, la veuve et l'indigent, autrement dit, ces citoyens qui n'ont aucun « défenseur ». Un tel message sonne comme un coup de tonnerre au lendemain du synode extraordinaire sur la famille. En effet, l’immigré, la veuve et l’orphelin sont considérés comme les couches les plus vulnérables de nos familles et de notre société. Et l'auteur sacré rentre dans les détails, comme c'est le cas pour l'objet donné en gage par un de ces pauvres (Cf. Ex 20, 25-26). Dans ce cas, c'est Dieu lui-même qui se porte garant de la situation de ce prochain. Ainsi, Dieu nous enseigne à aimer les faibles. De cette manière, il nous enseigne le respect face aux laissés-pour-compte. La Parole de Dieu oriente notre regard vers tous les orphelins qui, dans nos quartiers, souffrent et sont soumis à des abus. Vers les enfants qui, comme soldats, sont conduits dans le monde de la violence, vers les étrangers qui doivent mendier, les familles qui souffrent de la misère et de la faim, les veuves qui ne font l’expérience d’aucun amour. Aujourd’hui, prions pour que l’éclat de l’amour de Dieu caresse tous ces enfants, toutes ces femmes, et demandons à Dieu de nous aider à faire ce qui est en notre pouvoir pour que soit respectée la dignité des faibles. Adhérer au Christ relève donc d’un engagement résolument tourné vers le faible qui est l’image réelle et vivante du Christ. En aimant le prochain, surtout le faible, on aime celui dont il est l’image, c’est-à-dire le Christ. C’est cela toute la loi, son unité et son profond sens. Tout simplement. En effet, la question du docteur de la loi, « Maître, quel est le plus grand commandement de la Loi ? » (22, 36), laisse transparaître la préoccupation, qui est présente dans l'ancienne tradition judaïque, de trouver un principe qui puisse unifier les différentes formulations de la volonté de Dieu. Ce n'était pas une question facile, vu que dans la Loi de Moïse, 613 préceptes et interdictions sont énoncés. Parmi ceux-ci, comment y discerner le plus grand ? Jésus nous facilite la tâche, il abrège les choses. Tout ce que nous enseignent la Loi et les prophètes est résumé dans les paroles : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit... Tu aimeras ton prochain comme toi –même » (Mt 22, 37-39). Tout est là : la foi entière se réduit à cet unique acte d’amour, qui englobe Dieu et les hommes. En promouvant ce seul commandement de sa charte du salut, le Christ nous libère du poids écrasant des lois qui entourent nos traditions, nos us et coutumes. Sous les lunettes du Christ, nous comprenons bel et bien qu’une loi dépourvue d’amour est une loi qui ne contient pas Dieu, c’est une « tracasserie administrative » (Cardinal Laurent Monsengwo), une formalité traditionnelle et un rite social et/ou politique oiseux. Mais aussitôt se font jour de nouveau d’autres questions : comment pouvons-nous aimer Dieu et le prochain de tout notre cœur ? Dans la seconde lecture, nous pouvons voir une application concrète du commandement de l'amour au sein d'une des premières communautés chrétiennes. Saint Paul nous les montre comme « un modèle pour tous les croyants de Macédoine et d'Achaïe » (1 Th 1, 6-7). Malgré les faiblesses et les difficultés, malgré les tribulations, ils se sont mis à imiter les apôtres et le Seigneur, en accueillant la Parole (1 Th 1, 6-8). L'amour envers le prochain naît de l'écoute docile de la parole divine. Seule sa parole annoncée, vécue et célébrée peut aider nos familles à retrouver le chemin de l’amour de Dieu et du prochain. Devenons des modèles pour tous les croyants par un témoignage conforme à l’évangile, et non en entretenant « une spiritualité cosmétique » (Pape François), soucieuse des seules apparences. Dans un monde balloté pr le tourbillon de mille et une idéologies et tendances philosophiques, l’amour est devenu un slogan flatteur et utilitariste ; pire, il est réduit à un simple gadget. L’amour ne se « fait » pas, il se vit. L’amour n’est pas un mot, mais toute une vie. « L’amour est la vocation fondamentale de l’homme » (Jean Paul II). L’amour est au sommet de la hiérarchie des vertus chrétiennes et des valeurs humaines. Vraiment, il est juste et bon de relire l’hymne à l’amour de saint Paul (1 Cor 13, 1-13) pour se rendre bien compte de la portée de cette vertu théologale. Prions donc pour que le Seigneur nous inspire le vrai amour, celui qui vient de lui et qui va toujours vers le prochain. Demandons-lui la grâce de bâtir chaque jour de notre vie « la civilisation de l’amour ». Ce n’est qu’à ce prix que nous serons libérés de la loi du péché en vue de la vie éternelle. Amen !
Abbé Fabrice N’SEMI
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