Aimer le Christ pour être au service de son Eglise

 

 Aimer le Christ pour être au service de son Eglise (3ème Dimanche de Pâques – Année C)

Textes : Ac5, 27b-32. 40b-4 ; Ps 29 (30) ; Ap5, 11-14 ; Jn22, 1-19

Dimanche dernier, l’évangile de Jean nous a présenté les deux premières apparitions de Jésus ressuscité dans une maison, à Jérusalem en Judée, où les disciples étaient enfermés par peur des Juifs. Aujourd’hui, Saint Jean nous livre la troisième apparition dans un cadre plus familier aux disciples, celui de leur pays, la Galilée, et celui du travail de quelques uns d’entre eux, le lac de Tibériade où ils ont pendant longtemps exercé le métier de pêcheur. Ce déplacement de Jérusalem la ville sainte vers la Galilée est une invitation qui nous est adressée pour que nous découvrions que Dieu et le Christ rejoignent aussi les hommes et se révèlent à eux  dans leur vie et leurs occupations quotidiennes.

C’est au cours d’une pêche extraordinaire relatée par Luc 5, 1-11 que Jésus appelle ses premiers disciples ; et même si Jean situe cet appel dans un contexte tout autre que celui de la pêche, l’événement de la pêche miraculeuse qu’il a vécu reste gravé dans son cœur et sa mémoire à tel point qu’il est le premier à reconnaître que l’inconnu qui vient de leur donner l’ordre de jeter le filet à droite de la barque est le Seigneur ; le Seigneur vient de leur faire un magnifique clin d’œil : il n’a pas changé sa manière de faire et d’être : c’est toujours lui le Maître de la pêche miraculeuse ; en dehors de lui, les disciples ne peuvent rien accomplir. Et le pauvre Simon- Pierre qui comprend seulement bien après Jean, comme devant le tombeau vide, que Jésus est là ! Cette pêche miraculeuse après la résurrection est aussi le signe et le gage que les disciples deviendront des pêcheurs d’hommes au-delà des frontières du monde juif et qu’avec la présence agissante de l’Esprit Saint, l’unité de la communauté grandissante des disciples du Christ sera assurée : malgré la grande quantité de poissons, le filet ne se déchire pas ; appel toujours actuel et pressant  fait aux pasteurs de l’Eglise et à chaque baptisé à ne pas porter atteinte à l’unité du corps du Christ dans sa diversité.

Cette pêche miraculeuse, manifestation  du Christ ressuscité qui veille sur la barque Eglise et sur la mission qu’il lui a confiée, est également le lieu d’un appel privilégié que Jésus adresse à Simon-Pierre ; un appel à aimer le Christ pour servir son Eglise. Nous ne pouvons pas ne pas revoir la générosité de Pierre à suivre le Christ jusqu’à la mort, générosité qui s’éprouve rudement  par trois fois à son reniement  de celui qui va donner sa vie pour lui. « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? » Jésus attend de Pierre un amour absolu qui n’est pas de l’ordre du sentiment mais du don total de sa personne au Seigneur qui l’aime et qui s’est livré pour lui. Jésus veut faire grandir Pierre dans  la confiance et l’amour absolus afin qu’il soit configuré à son Maître. Ce n’est pas en serviteur, encore moins en administrateur que Pierre devra être le berger du troupeau que le Seigneur lui confie : « je ne vous appelle plus serviteurs car le serviteur ignore ce que fait son maître ; mais je vous appelle mes amis, parce que tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. Ce n’est pas vous qui m’avez choisi ; mais c’est moi qui vous ai choisis pour que vous alliez et portiez du fruit et que votre fruit demeure... » (Jn15, 15-17). Il n’y a pour nous l’ombre d’aucun doute que Pierre est aimé de Jésus, ni que la primauté de Pierre est le libre choix de Jésus qui aurait pu jeter son dévolu sur Jean  resté fidèle jusqu’au pied de la croix. Il nous revient donc de méditer cet amour sans condition de Jésus sur Pierre, cet amour qui ne juge pas, n’enferme pas dans une attitude, une parole, mais qui croit en l’homme avec ses faiblesses pour que soit pleinement manifestée la force de l’Esprit dans la vie  de l’apôtre pécheur, comme aime le dire Paul.

Surprenante également et exemplaire la réponse de Pierre : « Seigneur, tu sais tout : tu sais bien que je t’aime »

Pierre sait que les mots pour dire l’amour sont fragiles et même peuvent être biaisés. Il fait recours au regard de Christ-Dieu qui sonde les reins et les cœurs pour que soit révélée la profondeur de l’amour qu’il porte à Jésus malgré ses reniements. Réponse exemplaire de Pierre qui m’invite à donner chaque jour une réponse personnelle d’amour à Jésus. A chaque eucharistie dominicale nous disons notre profession de foi au Dieu Père, Fils et Esprit. Prenons garde à ce que cela ne devienne la récitation d’une formule qui ne servirait qu’à satisfaire notre bonne conscience alors que croire c’est faire confiance , c’est-à-dire aimer et se laisser aimer. Aimer ne se fait pas en pointillé, un jour je dis oui, un autre je dis non. Aimer, comme l’exige Christ à Pierre, c’est se donner totalement à chaque instant, se déposséder, étendre les mains pour se laisser conduire par l’autre vers les terres inconnues où l’on a peur de s’aventurer, mourir à soi-même afin de devenir une nouvelle création dans l’Esprit de notre baptême.

Demandons encore à Jésus de souffler sur nous pour que nous recevions l’Esprit ; nous expérimenterons alors, à l’exemple des disciples sur le lac de Tibériade, la présence aimante et agissante de Jésus dans notre vie quotidienne, en famille, au travail, dans le quartier, malgré les tensions et les difficultés. Il est là, au cœur de nos vies, et pas seulement quand nous sommes rassemblés dans nos églises paroissiales. Car comment dire en vérité à Jésus que je l’aime si je ne sais pas aimer ceux qu’il me donne à aimer ?

                    Abbé Olivier MASSAMBA-LOUBELO