Qui s’élève sera abaissé, qui s’abaisse sera élevé |
Qui s’élève sera abaissé, qui s’abaisse sera élevé (30e dimanche ordinaire - Année C)
Textes : Si 35, 15-17, 20-22; Ps 34; 2 Tm 4, 6-8, 16-18; Lc 18, 9-14
Le message de l’Évangile n’aura jamais fini de nous questionner. Tandis que le monde propose la logique de piédestal et de mépris, Jésus continue d’opposer la logique de l’humilité. Celle-ci est fondamentale dans la relation à Dieu et au prochain. Là où l’orgueil a gangrené les cœurs, il nous faut réentendre l’Évangile de l’humilité. Mais l’humilité que propose Jésus n’est pas un simple comportement ; elle est une attitude intérieure du cœur qui cherche Dieu et implore constamment sa miséricorde infinie.
La page l’Evangile de Lc 18, 9-14 nous introduit d’emblée dans un choix quelque peu trivial: le pharisien ou le publicain. La conscience chrétienne a tellement trituré l’image du pharisien que des stéréotypes nous viennent facilement à l’esprit. Pourtant, des pharisiens pieux, sages et avisés, Jésus en connaissait ( Lc13, 31 ; Jn3, 1-9; 38-40). Le terme de pharisien vient du grec pharisaios, tirant de l’araméen perichaya, «le séparé». Il indique originellement celui qui s’est séparé de Judas Maccabée et des Assidéens. A l’ordinaire, le pharisien est celui qui se distingue des autres par sa rigueur dans la pratique de la Loi. Il se prémunit du péché qu’il contraint par une ritualité excessive. L’aspect sur lequel Jésus s’insurge apparaît dans ce passage de Luc : «Il dit encore, à l’adresse de certains qui se flattaient d’être des justes et n’avaient que mépris pour les autres... » (Lc18, 9). Jésus reproche aux pharisienx leur contentement d’eux-mêmes, calqué sur l’amour-propre et l’orgueil.
Le terme publicain vient du grec telônès, impôt. S’illustrant davantage comme «collecteur d’impôt », le publicain reste généralement un subalterne : il est assimilé aux pécheurs publics (Lc18, 11). Jésus n’est pas dupe. Il connaît bien les préjugés nourris à l’endroit des publicains. Ces derniers sont tenus à l’écart par la branche conservatrice du judaïsme. C’est paradoxalement en raison de cette marginalisation que Jésus cite en modèle la prière du publicain. Cela n’est pas nouveau.
La Bible exalte la conviction d’un Dieu qui écoute la prière des humbles (Si 35, 17; ps34). Le mépris des pharisiens vient de ce que leur pratique religieuse oublie les trois pilliers de la caritative prophétique: l’étranger, la veuve et l’orphelin. La première lecture de Si 35, 15-17, 20-22 nous offre là-dessus quelques intuitions : 1-Dieu prend soin des laisser-pour-compte ; 2-Sa réponse ne tardera pas ; 3-Il est un Dieu de justice qui ne prend pas le parti des violents, des orgeuilleux, des injustes (Si35, 20-21).
En fait, si Dieu est du côté du mal-aimé, tout mépris à l’endroit de celui-ci est fait contre lui. Dans la deuxième lecture, 2 Tm 4, 6-8, 16-18, Paul nous enseigne qu’il est le Dieu Juste Juge. Arrivé au bout de sa course, il espère recevoir de lui la courronne de gloire promise à ceux et celles qui combattent le bon combat.
La lecture et la méditation des textes de ce jour nous tiennent en éveil devant deux conséquences de la vie de prière :
1. La prière est vide lorsqu’elle manque le rendez-vous de l’humilité. L’orgueil tue la vie spirituelle. Aussi longtemps que ce sentiment nous habitera, notre relation à Dieu sera toujours envisagée en terme de compétition. Ce qui compte pour Dieu ce n’est pas tant ce que nous avons fait mais ce que nous sommes.
2. La miséricorde de Dieu guérit. Lorsque nous nous ouvrons à elle, notre coeur se dilate à l’amour qui ne juge point. Un coeur qui prie vraiment ne saurait se complaire dans la méchanceté, l’indifférence, le mépris, la manipulation, la violence, l’agressivité, la médisance, etc. Une vie de prière authentique conduit normalement à des fruits visibles de conversion, dons de l’Esprit.
Abbé Luc Augustin SAMBA
|