Il n’y a de fidélité à Dieu que celle qui vient du Christ

 

Il n’y a de fidélité à Dieu que celle qui vient du Christ (7ème dimanche de Pâques – Année B)

 

Textes : Ac 1, 15... 26; Ps 102 ; 1 Jn 4, 11-10 ; Jn 17, 11b-19

 

Au moment où nous arrivons vers la fin du temps pascal, la liturgie nous ramène au début du livre des Actes des Apôtres. Il nous présente le remplacement de Judas par Matthias. Nous pouvons observer ici l’importance que la communauté accorde à la succession apostolique. Elle deviendra un principe important dans la suite. Cette succession se veut sans interruption jusqu’à ce jour. C’est Pierre qui manifeste ce souci au nom de toute l’Eglise. La primauté lui revient depuis que le Christ lui a donné les clefs du Royaume des cieux (Cf. Mt 16, 13-20). Dans le livre des Actes, à plusieurs endroits, il prendra certaines décisions importantes de la communauté chrétienne naissante (Cf. Ac 6, 1-7).

A côté de la succession apostolique, on peut aussi noter la responsabilité collégiale des apôtres dans le témoignage de la résurrection du Christ. C’est la première tâche qui leur revient. Et devant cette tâche, tout le reste peut occuper un second rang. Ce témoignage de la résurrection, ils le porteront à travers le ministère de l’enseignement, le ministère de la parole de Dieu (Ac 2,42 ; 4,33 ; 6,2-4).

Il convient de mentionner, en outre, l’importance du Seigneur Jésus lui-même, ressuscité et toujours présent au milieu de son Eglise. La prière lui est adressée. C’est finalement lui qui choisit le candidat que l’Eglise a présenté. La communauté chrétienne continuera à opérer avec la conscience de la présence du Seigneur. En effet, dans l’évangile de Matthieu, il avait promis d’être avec ses disciples jusqu’à la fin des temps (Mt 28, 20). Le temps où la communauté chrétienne se déploie est aussi le temps où l’on fait l’expérience de cette promesse. L’Eglise continuera d’invoquer son Seigneur, avec la certitude qu’elle est toujours exaucée par lui, car il est présent en son sein. C’est lui qui la guide. Du côté de l’Eglise, reste vive la conscience de la présence et de l’action du Seigneur ressuscité. Et partout où cette Eglise se rassemble, le Christ est présent avec son Esprit.

La deuxième lecture va dans le même sens, mais en l’approfondissant. Dieu est présent là où est l’amour des uns pour les autres. Cette lecture reprend le thème du dimanche dernier. En effet, l’évangile de ce dimanche s’achevait sur cet ordre du Christ : « Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres ». Et c’est de là que part l’extrait que Jean nous présente aujourd’hui. Jean, que l’on peut appeler le théologien de l’amour, nous révèle que celui-ci est nécessaire pour l’homme, parce qu’il est présent d’abord en Dieu. C’est le sens fondamental de cette exhortation. L’amour de Dieu pour l’homme est modèle de l’amour des hommes entre eux. Et celui-ci est gage et garantie de la présence de Dieu, signe de l’union avec Dieu. Comment des hommes auraient-ils pu s’aimer vraiment s’ils n’avaient pas eu ce modèle divin ? Ils sont appelés à s’aimer puisque Dieu les aime tant. Nous expérimentons tellement de difficultés dans ce domaine de l’amour que nous avons vraiment besoin de celui d’en haut.

L’amour de Dieu vient, par ailleurs, ennoblir, donner consistance à l’amour humain, dans la mesure où Dieu lui-même vient demeurer là où l’on aime et porte tout à la perfection. Mais comme nous l’insinuions la dernière fois, il s’agit ici de l’amour qui est éclairé par la profession de foi en Jésus Christ, parce que c’est lui qui nous a aimés de manière vraie, libre, pleine, sans égoïsme ou autre recherche de soi, sans rien attendre en retour. Il s’agit d’un lien indissociable : aimer et professer que Jésus est le Fils de Dieu. C’est lui qui est le baromètre de notre amour.

Le passage de l’Evangile nous rapporte un extrait de la prière de Jésus avant sa passion. On sent la gravité de l’heure, alors le Christ invoque son Père en faveur de ceux qui restent. On comprend à travers cette prière que Jésus avait voulu que l’œuvre de rédemption qu’il avait inaugurée sur terre se poursuive même après son retour auprès du Père. A travers cette prière, le Christ exerce sa fonction sacerdotale. Il est le prêtre de la nouvelle alliance qui intercède pour les hommes auprès de Dieu. Il porte le souci de l’œuvre pour qu’elle arrive à son achèvement. Il est très conscient de l’humanité de ceux à qui il la confie. Alors il ne les abandonne pas. Ceux-ci doivent à leur tour cultiver la conscience et l’assurance de l’intercession de leur Maître. Du ciel où il est assis à la droite du Père (Mc 16, 19), il intercède pour eux. Le premier fruit de cette intercession du Christ sera l’envoi de l’Esprit Saint qui viendra poursuivre son œuvre dans le monde. La Lettre aux Hébreux a beaucoup exploité cette thématique du sacerdoce du Christ (Hé 5, 1-10 ; 7, 11-28 ; 8, 1-13).

Le Seigneur prie pour ses disciples afin qu’ils restent fidèles à Dieu, que personne ne se perde. Cette fidélité est la même que Jésus a montré à son Père. Il n’y a de fidélité à Dieu que celle qui vient du Christ, celle qui prend racine en lui. Le disciple se doit toujours de la rechercher, de la cultiver. La fidélité est une vertu requise surtout lorsqu’arrivent la tribulation, les épreuves. Les apôtres montreront une grande fidélité à Dieu jusqu’à la mort.

Une autre intention présente dans la prière de Jésus est celle de la joie des disciples. Que l’adhésion au Christ ne soit pas un motif de tristesse. Encore mieux, quand bien même les disciples rencontreraient des occasions de tristesse ou d’angoisse, qu’il ne leur manque jamais la joie d’appartenir au Christ et de subir tout cela avec lui, en son nom. C’est une caractéristique de la première communauté chrétienne. Les apôtres se réjouissaient aussi de subir des épreuves pour le Christ (Ac 5, 41). L’Evangile ne veut pas effacer la tristesse, l’angoisse, etc., de la vie de l’homme. D’ailleurs, c’est bien lui qui parle de la haine présente dans le monde. Mais, malgré cela, le disciple peut toujours trouver de la joie en Dieu.

Plus loin dans la prière, apparaît la demande d’être gardé du Mauvais. Cette demande rejoint celle du Notre Père : « Délivre nous du mal » (Mt 6, 13). Le Mauvais est l’ennemi de l’épanouissement du royaume de Dieu sur terre. Le Christ en a conscience et veut que les siens en soient préservés. Certes, il ne faut pas ici légitimer tous nos excès dans ce domaine, surtout dans notre culture congolaise, mais nous voulons tout simplement signaler jusqu’où arrive le souci du Christ pour son Eglise qui continue son œuvre dans le monde.

Une dernière demande du Christ est celle de la consécration dans la vérité. Cette demande peut être difficile à comprendre, en raison du langage auquel nous ne sommes pas habitués. Le verbe que Jean utilise veut dire mettre à part. Dans l’Ancien Testament, Aaron et ses enfants étaient mis à part pour le service divin. Dans ce sens, le Christ lui-même a été mis à part par Dieu pour la vérité. Il dira à Thomas qu’il est le Chemin, la Vérité et la Vie (Jn 14, 6). La vérité consiste en la conformité entre ce qu’il dit et enseigne, et ce qu’il a vu et entendu d’auprès de Dieu. Au moment où il quitte la terre, il veut aussi que les disciples soient mis à part pour cette vérité. L’œuvre du Christ passe désormais entre leurs mains.

Alors que nous nous préparons à la Pentecôte, la liturgie veut nous rappeler des éléments importants de notre vie ecclésiale : l’importance de la collégialité et de la succession apostolique, la nécessité de la présence du Christ et de l’amour qui le rend présent en union avec la foi, enfin, l’intercession du Christ en faveur de ceux à qui il confie sa mission, et ce jusqu’à la consommation des siècles.

Abbé Ildevert M. MOUANGA

Grand Séminaire E. BIAYENDA