Que dois-je faire, pour avoir en héritage la vie éternelle ?

 

Que dois-je faire, pour avoir en héritage la vie éternelle ? (28ème Dimanche ordinaire – Année B)

 

Textes : Sg 7, 7-11 ; Ps 89 (90) ; Hb 4, 12-13 ; Mc 10, 17-30.

 

Chers frères et sœurs en Christ,

 

La Parole de Dieu de ce dimanche nous invite à méditer, entre autres, autour de trois vocables : la sagesse, la richesse et le regard. Cependant, le style apparemment tranchant, de l’évangile de ce jour, peut porter à nous positionner pour, ou contre cette exigence, que Jésus semble imposer à ses disciples : tout abandonner pour le suivre. Ainsi, suite à la question que lui pose cet homme, dont on ignore l’identité : « Seigneur, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? », Jésus donne une réponse, qui suscite une attitude non moins déconcertante, chez ses disciples.

 

En effet, le langage du maître les pousse à se demander s’il vaut la peine de continuer à le suivre et d’espérer être sauvé par lui, « s’il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille, qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu ». Oui, ils n’hésitent pas à se demander : « alors, qui sera sauvé ? », puisque, tous, d’une manière ou d’une autre, nous sommes un peu riches « quelque part ». Nous découvrons ici un Jésus, qui vient bouleverser le contenu des us et des mœurs des humains, des civilisations déjà millénaires, non seulement par son enseignement, mais aussi et surtout, par le témoignage de sa vie. Oui, sa sagesse dérange. Les disciples en font l’expérience. Oui, il la révèle sous divers termes, et à différentes circonstances, en nous disant, par exemple : «…Si quelqu’un te gifle sur la joue droite, laisse-le te gifler aussi la joue gauche…Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent… » (Mt5, 38-45) « …Si l’un de vous veut être grand, il doit être votre serviteur, et si l’un de vous veut être le premier, il doit être votre esclave… » (Mt20, 25-28) « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le feu… non, je vous le dis, non pas la paix, mais la division ».

 

 Tout ceci parait impossible aux yeux des hommes, parce que, ce n’est pas leur logique, mais, pour Dieu, tout cela est possible. C’est pourquoi, il nous souhaite la paix et nous propose sa paix, mais pas à la manière du monde (Jean14, 27), car il ne vient pas abolir la loi de Moïse et l’enseignement des prophètes, mais « leur donner tout leur sens » (Mt5, 17). Ne paniquons donc pas, ne nous troublons pas. Cependant, son enseignement, qui est un des lieux de la manifestation de sa sagesse, devait et doit nous déranger, si réellement nous le prenons à notre compte. Il doit nous porter à nous poser des questions, comme celles des gens de Nazareth, qui se demandaient : « D’où lui vient cette sagesse… n’est ce pas lui le fils du charpentier ? Marie n’est-elle pas sa mère ?... » (Mt13, 55-57). Sa sagesse devait plutôt éveiller notre conscience à cet essentiel, qu’est la vie éternelle, et chercher à découvrir comment y accéder. 

 

Oui, sa sagesse n’est pas similaire à celle des hommes. Elle se découvre, entre autres, dans son enseignement qui, du reste, est un évangile vivant, une parole « énergique et plus tranchante qu’une épée à deux tranchants », laquelle devait pénétrer « au plus profond de l’âme », comme nous le signifie la lettre aux Hébreux. Mais, pour comprendre cet enseignement et y adhérer, il faut la sagesse et l’intelligence, qui ne viennent que de Celui qui est la Sagesse et l’Intelligence même : Dieu. C’est ce que Salomon a demandé justement à Dieu, lorsqu’il a succédé à son père David : « Donne à ton serviteur un cœur attentif, pour qu’il sache gouverner ton peuple et discerner le bien et le mal ». Et Dieu, de répondre : « Puisque c’est cela que tu as demandé, et non pas de longs jours, ni la richesse, ni la mort de tes ennemis… mais l’art d’être attentif et de gouverner… je te donne un cœur intelligent et sage » (1 R 3, 9-13)

 

Ne serait-ce pas pour nous, l’occasion de prendre à notre compte cette demande de Salomon ? Oui, solliciter la sagesse et l’intelligence de Dieu, les préférer à toute autre forme de richesse.

A quoi bon, chers frères et sœurs, chercher à s’approprier toutes les richesses du monde, si l’on vient à perdre son âme, s’exclame le psalmiste ! Pensons à l’épisode de ce riche, qui avait amassé toutes ses richesses, et qui s’est dit : « ça y est, te voilà riche de tout ce qu’il te faut. Repose-toi. Mange. Bois. Amuse-toi » (Luc12, 13-21). Et pourtant, cela ne veut pas, pour autant dire, que la richesse relève du mal. Non, le Christ nous dit plutôt : « Rien ne sert de devenir riche pour soi, si on ne devient pas riche pour Dieu », et donc pour le bien de tous.

 

C’est ce qu’il traduit dans ce regard qu’il pose sur ce jeune homme « riche », mais dont on ignore le nom. En fait, cet inconnu, c’est chacun de nous. Oui, Jésus va dans son sens, en suscitant un vrai dialogue avec lui, lequel l’amène à lui rappeler les commandements, afin qu’il fasse librement son examen de conscience, sans que lui, Jésus, ne le juge, ni ne l’oblige à quoi que ce soit. Oui, la richesse n’est pas un mal en soi, mais un bien qui devait et doit nous ouvrir aux autres, et particulièrement aux plus pauvres, aux démunis, aux laissés-pour-compte… C’est ici que nous pouvons reconnaître le bienfait des associations caritatives, et pourquoi pas humanitaires, et la notion de la solidarité, si chère à toutes les cultures.

 

Enfin, prions le Seigneur, pour qu’il nous obtienne sa richesse, celle qui vient de sa parole, de sa sagesse. Que l’attitude du jeune homme riche nous donne de reconnaître humblement que, nous aussi, sommes, d’une manière ou d’une autre, riches, et que nous avons à apprendre à partager, avec joie, tout en cultivant un regard qui bénit, compatie et rassure. Que nos richesses ne nous aliènent pas, mais nous ouvrent aux autres et à l’universel.

 

Abbé Charles MABIALA PAMBOU