Le Seigneur vient sans cesse dans ma vie |
Le Seigneur vient sans cesse dans ma vie (1er dimanche de l’Avent – Année B) Textes : Is 63, 16b-17.19b; 64, 2b-7 ; Ps 79 ; 1Co 1, 3-9; Mc 13, 33-37 Aujourd’hui, c’est le "Buanana" de l’Église. Nous commençons une nouvelle année liturgique. Et comme nous le savons, l’année liturgique débute avec le temps de l’Avent : un temps merveilleux où l’Église nous fait célébrer la venue de Dieu, dans ses deux moments. Elle nous invite tout d'abord à réveiller en nos cœurs l'attente du retour glorieux du Christ ; puis, Noël s'approchant, elle nous appelle à accueillir le Verbe fait homme pour notre salut. Mais le Seigneur vient sans cesse dans notre vie. Dans le mystère de l’incarnation, l’infinie distance entre Dieu et l’homme était dépassée. Dieu ne s’était pas seulement penché vers en bas, comme disent les Psaumes ; il a vraiment « déchiré les cieux », il est vraiment « descendu », entré dans le monde pour devenir l’un de nous et pour nous attirer tous à lui, et à tout instant. L'appel constant de Jésus, qui en ce dimanche nous est reproposé avec force : « Veillez ! » (Mc 13, 33.35.37) est donc plus que jamais opportun. Par trois fois, dans ce petit passage de Marc, nous écoutons le Seigneur nous réveiller afin que notre vie retrouve sa juste orientation, vers le visage de Dieu. C’est un rappel salutaire à se souvenir que le Seigneur est toujours présent dans ma vie et dans les événements du monde ; qu’il n'est pas loin de nous, inconnu, énigmatique, voire dangereux mais proche de nous. Dans un monde où existent mille croyances, saisir le reflet du visage du Dieu véritable et les traces de son amour au « présent » n’est pas de toute évidence. Isaïe, le prophète de l’Avent, nous le dit aujourd’hui avec une prière pleine d’angoisse adressée à Dieu au nom du peuple. Il reconnaît les manquements – oublie et assoupissement – de son peuple, et, à un certain moment, il dit : « Personne n'invoquait ton nom, nul ne se réveillait pour recourir à toi. Car tu nous avais caché ton visage, tu nous avais abandonnés au pouvoir de nos iniquités » (Is 64, 6). Comment ne pas être frappés par cette description ? Elle reflète la situation du monde grec de l’époque où il n'apparaissait pas clairement s'il existait un Dieu bon ou un Dieu méchant, ou tout simplement aucun Dieu. La religion de l'époque parlait de nombreuses divinités, en opposition l'une avec l'autre, au point de devoir craindre que si l'on faisait quelque chose en faveur d'une divinité, l'autre pouvait s'offenser ou se venger. Les grecs vivaient ainsi dans un monde de peur, entourés par des démons dangereux, sans jamais savoir comment se sauver de ces forces en opposition entre elles. Cette description reflète aussi notre contexte actuel, où la vie devient anonyme et horizontale, où Dieu semble absent et l’homme le seul maître, comme s’il était lui-même l’artisan et le metteur en scène de tout. Et parfois, dans ce monde qui apparaît presque parfait, des choses bouleversantes se produisent, soit dans la nature, soit dans la société, alors nous pensons que Dieu s’est comme retiré, qu’il nous a, pour ainsi dire, abandonnés à nous-mêmes. En réalité, Dieu est là. Et Saint Paul, dans la seconde lecture, nous confirme dans cette certitude. Toute notre vie chrétienne est orientée pour découvrir et vivre la fidélité du Dieu de Jésus Christ. Toute l’histoire du salut est un parcours d’amour, de miséricorde et de bienveillance. Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob a toujours été le Dieu proche, qui n’a jamais abandonné son peuple. Plusieurs fois il en a subi l’infidélité avec tristesse et attendu le retour avec patience, toujours dans la liberté d’un amour qui précède et soutient l’aimé, attentif à sa dignité et à ses attentes les plus profondes. Toutefois il attend en retour notre sensibilité à sa présence. C’est cela tout le sens du maître-mot de la liturgie de ce premier dimanche de l’Avent, mieux du temps de l’Avent : « veillez ! ». Nous devons devenir des personnes vraiment vigilantes, pas des gens qui somnolent ou qui dorment. Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie développer sa sensibilité pour Dieu (dans la prière, les sacrements, l’écoute de sa Parole, la pratique de la charité…), pour les signes silencieux par lesquels il veut nous guider, pour les multiples indices de sa présence. Il y a des personnes qui sont devenues incapables d’écouter le murmure de l’Esprit. L’aptitude à percevoir Dieu semble presque un don qui est refusé à certains. Et en effet – notre manière de penser et d’agir, la mentalité du monde contemporain, l’éventail de nos diverses expériences (comme les pratiques ésotériques) sont de nature à affaiblir la sensibilité à Dieu, le Dieu véritable. Et pourtant dans toute âme est présente, de façon cachée ou ouverte, l’attente de Dieu, la capacité de le rencontrer. Pour obtenir cette vigilance, cet éveil à l’essentiel, nous voulons prier, pour nous-mêmes et pour les autres, pour ceux qui semblent être sourds et chez qui, cependant, le désir que Dieu se manifeste est vif. Le Seigneur est toujours proche et présent au milieu de nous. Avec la Vierge Marie, qui nous guide sur le chemin de l’Avent, faisons nôtres les paroles du prophète : « Seigneur, tu es notre Père. Nous sommes l'argile, et tu es le potier: nous sommes tous l'ouvrage de tes mains » (Is 64, 7). Ouvre les yeux de nos cœurs, afin que nous devenions vigilants et voyants et qu’ainsi nous puissions aussi porter ta proximité aux autres. Amen. Père Raphaël Bazebizonza, sj.
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