Annoncer l'Évangile n'est pas une occasion de glorification

 

Annoncer l'Évangile n'est pas une occasion de glorification (5e Dimanche ordinaire - Année B) 

 

Textes: Jb 7, 1-4. 6-7; Ps 146, 1. 5-7; 1 Co 9, 16-23; Mc 1, 29-39 

 

Aujourd’hui, nous continuons à fixer notre regard sur Jésus qui poursuit son ministère. Dimanche dernier, nous avons vu Jésus, accompagné de ses disciples, enseigner dans la synagogue avec autorité et délivrer un homme possédé par un démon. Un  démon auquel il a donné vivement l’ordre de se taire. Et le passage finissait avec ces mots. “Dès lors, sa renommée se répandit dans toute la région de la Galilée”. Nous avons dit que la synagogue était, pour les croyants, le lieu de rencontre, d’annonce de la parole de Dieu et de prière. Marc a donc présenté ainsi, de manière synthétique, les principaux lieux et éléments de son évangile et du ministère de Jésus.

Nous pouvons considérer l’évangile d’aujourd’hui comme une journée entière du ministère de Jésus. En effet, avec lui, commençant avec le début de la journée (vv29-31), nous passons au soir (v32) pour terminer avec le matin 8(v35). Nous référant au dimanche dernier, nous notons et retenons que Jésus a changé de lieu. Il est passé de la synagogue, lieu religieux officiel, à un lieu ordinaire et plus familier. Et il n’est pas seul. Là-bas, il était accompagné de ses disciples, sans précision de noms. Ici, par contre, Marc est plus clair, en disant que Jésus est accompagné de deux de ses premiers disciples, Jacques et Jean, avec lesquels il va rejoindre Simon et André, ainsi que la belle-mère de Pierre qui est malade, et que Jésus guérit. Ici encore, même si nous n’avons pas de nom, nous savons que la personne guérie est connue. Du malade qui avait été délivré d’un esprit mauvais, rien n’était dit après sa guérison. Ici, par contre,  la malade, après sa guérison, “les servait”. Par ce mot, que nous trouvons pour la première fois, nous pouvons parler d’une précieuse indication sur l’objectif essentiel de toute existence humaine, et de celle de Jésus en particulier: “être au service” : “Le Fils de l’homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude”. Et cette révélation, Jésus la fera aux douze en se référant justement aux deux disciples mentionnés ici, qui voulaient siéger aux premiers postes à coté de Jésus dans son royaume.

Comme déjà mentionné plus haut, la renommée de Jésus se répand un peu partout, mais il continue à interdire aux démons, qui le reconnaissent, de parler de lui. Comme sa présence ne peut pas passer inaperçue, les gens accourent toujours partout où il se trouve, apportant avec eux, tous les malades et les démoniaques. De façon implicite, mais suffisamment claire, Marc souligne encore que l’essentiel du ministère de Jésus ce ne sont pas les guérisons, mais l’enseignement. Voilà pourquoi Marc souligne qu’il guérit, non pas tous les malades et tous les démoniaques, mais “guérit beaucoup de malades et chassa beaucoup de démons, sans cesser de demander aux démons  de se taire.

Si Jésus est venu parmi nous, c’est pour rester avec nous et nous sauver. Pour être toujours fidèle à son Père et à sa mission, il a toujours donné une très grande importance à sa relation avec son Père, car  c’est dans cette relation qu’il tirait, chaque jour, lumière et force. Si aujourd’hui l’Église – ainsi que chacun et chacune d’entre nous qui en sommes les membres -  veut rester fidèle à la mission à elle confiée par le Christ Jésus, elle est obligée de suivre la voie tracée par son Maitre qui est “le chemin, la vérité et la vie”. Et pour cela, comme a fait Jésus, chacun et chacune d’entre nous a le devoir de se détacher, régulièrement et de temps en temps, de ses autres occupations ordinaires pour enter en contact avec le Seigneur par la prière, par la parole de Dieu et la méditation. C’est à  cette conclusion que nous amène cette belle parole de Marc qui risque de passer inaperçue: “Le matin, bien avant le jour, il (Jésus) se leva, sortit et s’en alla dans un lieu désert, et là il priait”.

Même si les gens veulent souvent nous retenir auprès d’eux, nous empêchant ainsi de les quitter, de prier et de nous tourner vers les autres, nous avons le devoir de nous arracher. En agissant ainsi, nous trouverons le temps de parler à Dieu et d’aller en d’autres endroits pour y faire  entendre aussi la Bonne Nouvelle et y guérir, si telle est la  volonté du Seigneur. Ce que Jésus est  venu faire, “annoncer l’Évangile”, c’est le thème qu’aborde l’apôtre Paul. Et c’est à cela qu’il a consacré toute sa vie parce qu’il avait décidé de suivre Jésus. Désormais, pour lui, “annoncer l’Évangile, ce n’était plus un titre de gloire ni une occasion pour “vivre de l’Évangile”, - même si le Seigneur l’a prescrit (Cf. 1Co ), 9, 14). Comme pour Paul, comme pour l’Église, comme tous les porteurs de l’Évangile  et tous les chrétiens, “annoncer l’Évangile” ne peut pas et ne doit pas être un titre de gloire. “C’est une nécessité qui nous incombe”. Si nous avions à nous glorifier, nous devons nous glorifier uniquement de la croix du Christ. Même si Jésus avait dit que “l’ouvrier a droit a son salaire”, l’apôtre Paul a préféré annoncer l’Évangile gratuitement. En effet, Jésus a dit aussi. “Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement”.  Non seulement l’apôtre a porté l’Évangile gratuitement, mais encore il s’est rendu totalement disponible pour cette tache et s’est fait tout à tous.

Tout cela n’est pas facile dans le monde, la société et les situations qui sont les nôtres. Comme illustration, nous pouvons seulement parler de la pauvreté, de la maladie et des épreuves de toutes sortes. Le langage de Job dans la première lecture nous fait toucher du doigt ce que vivent des millions de nos frères et sœurs  autour de nous et à travers le monde. L’Évangile que nous proposent Jésus et l’Église, et que nous sommes appelés à proclamer et à vivre, même s’il vise d’abord la vie éternelle, est également la meilleure voie pour trouver une solution à toutes ces situations déplorables de notre vie et de notre monde. Il nous prévient contre les pièges de la matérialité, de la cupidité et de l’enfermement en nous-mêmes ou dans un seul groupe de personnes. Même si nous possédons beaucoup de biens de ce monde, évitons toujours de nous y attacher; nous nous orienterons toujours vers les biens éternels.

En effet, de tout ce que nous avons sur cette terre, nous n’apporterons rien avec nous dans la tombe. Cherchons sincèrement à nous ouvrir à tous et  surtout à ceux et celles qui sont le plus dans le besoin. C’est aussi cela que signifie “aimer son prochain comme soi-même”. C’est ainsi que nous réussirons, tout en gardant notre identité, à accepter les autres, aussi bien les personnes individuelles que les groupes ethnique ou régionaux différents des nôtres. Notre Évangile s’adresse à toutes les personnes sans aucune discrimination. Être tout à tous, comme l’a fait l’apôtre Paul, n’est pas du tout facile. Pour y arriver et vivre en  véritables évangélisateurs, n’oublions jamais la  voie royale de la prière, celle que nous montrent Jésus et l’apôtre Paul et que tous les saints ont suivie.

 

Mgr Bernard NSAYI

Évêque émérite de Nkayi