Un temps pour mieux suivre Jésus

 

Un temps pour mieux suivre Jésus (1e Dimanche de Carême - Année B)

Textes : Gn 9, 8-15 ; Ps 24, 4-9 ; 1P 3, 18-22 ; Mc 12-15

Nous sommes entrés dans le temps de  Carême. Un temps au cours duquel nous prenons plus de temps pour être avec Jésus, pour l’écouter, et pour mieux le suivre. Et suivre Jésus, c’est méditer sur son baptême et notre baptême, accepter de mener, avec lui et comme lui, la lutte contre le démon, nous convertir et croire à la Bonne Nouvelle.

Le baptême nous fait entrer dans la mort et la  résurrection de Jésus : « Par le mystère pascal, nous avons été mis au tombeau avec le Christ dans le baptême, afin que nous vivions d’une vie nouvelle » (Cf. texte de la  veillée pascale). Ce sacrement, nous l’avons reçu gratuitement de Dieu, par Jésus et dans l’Eglise qui est son Corps et dont nous sommes les membres. La première lecture,  qui nous parle du déluge, montre cet amour miséricordieux et gratuit de Dieu qui avait choisi Noé, parce qu’homme juste. Celui-ci avait fait construire une arche dans laquelle il fit entrer quelques hommes, leur  épargnant ainsi la destruction. Dans la Nouvelle Alliance, le seul et véritable homme juste, c’est Jésus.  Par lui, par sa passion, mort et résurrection,  Dieu établit avec nous une  Alliance nouvelle et éternelle. En demandant d’être baptisé comme les autres hommes qui venaient se faire baptiser, Jésus est entré, non  seulement  dans  les eaux du Jourdain, mais également en solidarité avec nous pécheurs, pour nous délivrer de nos péchés et nous faire entrer  dans le « règne de Dieu ». Entrer dans l’eau – rite remplacé par le versement de l’eau sur la tête –, c’est comme mourir, entrer dans un tombeau. Et sortir de l’eau, c’est comme ressusciter. Par le baptême, nous entrons dans le projet de Dieu, nous suivons l’exemple de Jésus qui s’est fait baptiser, nous entrons dans l’obéissance de la foi par rapport à l’ordre qu’il a donné à ses disciples : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils et du Saint Esprit, et leur apprenant tout ce que je vous ai prescrit » (Mt 28, 19-20).

Après   avoir été baptisé, Jésus a été poussé au désert. Pendant quarante jours, il jeûne, et il est tenté par le démon. Et de cette lutte, il sort victorieux.  Pendant le carême, qui dure justement quarante jours, nous suivons les traces de Jésus. Ensemble avec lui, nous décidons de lutter contre le mal qui est en nous, qui est dans le monde, d         ans la société et dans nos familles. Un des moyens à notre disposition est celui que Jésus a vécu, c’est-à-dire le jeûne, la modération, les privations volontaires, pour être plus libre pour mieux servir Dieu. Ce jeûne, comme le souligne bien l’évangile du mercredi des cendres, doit être étroitement lié au deux autres indications du Seigneur, c’est-à-dire l’aumône et la prière. Ces trois indications, qui sont inséparables et dont la prière constitue le centre et le point le plus important, nous permettent de sortir de nous-mêmes pour mieux nous ouvrir à Jésus et aux autres ou, mieux encore, comme le dit si bien le pape François, pour passer de la « mondialisation de l’indifférence à la mondialisation de la charité et de la solidarité » (Cf. son  Message pour le Carême).

Pendant la journée, nous sommes pris par une multitude d’activités. Elles nous prennent beaucoup de temps et semblent ne pas nous permettre d’en trouver pour la prière. Nous nous trouvons exactement dans la situation de Marthe. Elle était prise par les différentes activités liées à l’accueil que les deux sœurs devaient réserver à Jésus. Ce qu’elle faisait était donc important. Mais cela la surchargeait, la mettait tellement en agitation qu’elle sentait la fatigue. Elle a donc réagi en demandant à sa sœur de venir l’aider au lieu de « rester là assise » – cela signifiait, pour elle à « rester là sans rien faire ». C’était son programme à elle, qui était sans doute utile, mais pas plus important que le programme de Jésus : « Annoncer la Bonne Nouvelle ». Marie, elle, l’a bien compris. Elle a choisi de « perdre son temps » pour Jésus, pour l’écoute de sa parole, pour la Bonne Nouvelle du règne de Dieu. Et Jésus précise qu’elle a choisi la meilleure part (Cf. Lc 10, 38-41). Ce que fait Marie, c’est-à-dire donner du temps pour  écouter Jésus, pour parler à Jésus, c’est prier. En effet, la prière est nécessaire pour nous aider à comprendre la parole de Dieu et à la mettre en pratique. Et à son tour, la parole de Dieu nourrit notre prière. Prière et parole de Dieu sont inséparables. C’est avec elles et en elles que nous trouvons la force pour pratiquer l’aumône, pour sortir de nous-mêmes, pour nous ouvrir aux autres, pour sortir de notre égoïsme et aider les autres à faire de même.

Faire l’aumône, c’est ne pas rester indifférent mais réagir et agir pour venir en aide à celui qui se trouve dans le besoin. Les domaines dans lesquels nous pouvons intervenir sont nombreux, sans avoir la même importance. Par exemple, la prière, la parole de Dieu, pour laquelle Jésus a consacré toute sa vie. Sans oublier que ces deux réalités étaient accompagnées de signes de grand amour, de grande compassion et d’actions bien concrètes telles la multiplication des pains,  les guérisons des malades et des personnes possédées par le démon. Aujourd’hui, faire l’aumône, c’est aussi lutter pour le respect envers chaque homme et chaque femme que nous rencontrons, parce que nous avons tous la même dignité de fils et filles de Dieu. C’est lutter pour qu’il y ait plus de justice entre les hommes et les peuples. Dans un monde de violence de toutes sortes, c’est lutter pour le dialogue, la réconciliation et la paix véritables.

Pour vivre un Carême fructueux, chaque jour, fixons nos yeux sur le Christ qui est mort pour nos péchés. Rappelons-nous notre baptême qui a fait de nous tous et toutes des fils et des filles de Dieu et membres de son Corps qu’est l’Église. Comme nous y invite la première prière, sortons de notre immobilité, mettons-nous en marche, comme des pèlerins. Que la lecture et la méditation plus régulière de la parole de Dieu  nous aident à « progresser dans la connaissance de Jésus ». Lui est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. Comme lui, mettons-nous au service les uns des autres. « Être baptisés c’est s’engager envers Dieu avec une conscience droite, et participer ainsi à la résurrection de Jésus-Christ ».

Comme « l’amour pour Dieu » et « l’amour pour le prochain » sont inséparables, nous engager pour Dieu, c’est nécessairement nous « engager au service de  nos frères et sœurs, surtout ceux qui sont le plus dans le besoin. Seuls, nous sommes dans les ténèbres et nous n’arriverons pas à nous mettre au service des autres de façon efficace. Nous devons donc prendre de plus en plus conscience que nous avons besoin, non seulement de l’aide de Dieu, mais encore de celle de nos frères et sœurs avec lesquels nous pouvons travailler ensemble. Sortons de notre ‘‘indifférence’’. Engageons-nous pour bâtir un monde et une société plus justes et plus solidaires. Travaillons pour améliorer, ensemble, les conditions de vie  de  nos frères et sœurs. Même si nous avons beaucoup de choses à faire, faisons tout notre possible pour trouver, chaque jour, un temps à consacrer à la rencontre avec le Seigneur. Ainsi, nous trouverons l’aide nécessaire pour nous ouvrir à la lumière du Christ par une vie de plus en plus fidèle et porter, de façon  crédible, la Bonne Nouvelle aux autres ».

                                                                    Mgr Bernard NSAYI

                                                                    Évêque émérite de Nkayi