La transfiguration est un message de conversion |
La transfiguration est un message de conversion (2e Deuxième dimanche de Carême – B) Textes : Gn 22, 1-2. 9a. 10-13. 15-18 ; Ps 115(116) 10. 15-19 ; Rm 8, 31-34 ; Mc 9, 2-20 En ce deuxième dimanche de Carême, dans notre marche vers Pâques, arrêtons-nous sur ce beau et mystérieux récit de la Transfiguration, dans lequel nous avons comme protagonistes, non seulement Jésus, Pierre, Jacques et Jean, mais aussi Moïse et Elie. La première lecture nous présente Dieu, Abraham et Isaac. Dieu, présent dans tout ce récit, du début à la fin, nous demande de nous situer dans la perspective du mystère de Dieu, de Jésus, des disciples et de chacun d’entre nous. En effet, « nous croyons en Dieu, le Père Tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre, et en Jésus-Christ son Fils unique, notre Seigneur ». Dieu a appelé Abraham, pour faire de lui le père de tous les croyants, l’a accompagné tout au long de sa vie, pendant qu’il demandait à Dieu de lui donner un descendant, pendant la naissance de son Fils Isaac et pendant sa dure épreuve, quand Dieu lui demande de lui sacrifier ce même fils unique qu’il a attendu pendant des années. Et quand il lui demande de sacrifier son fils, même là, sans rien dire, même s’il en souffre, il ne dit rien, et il obéit. Dieu a un plan merveilleux pour nous. Sur la base d’un appel, il veut faire de chacun et de chacune d’entre nous des collaborateurs dans la réalisation de ce projet, dont il reste le principal acteur. Comme à Abraham, la seule chose qu’il nous demande, c’est de croire en lui, de lui faire confiance et de lui obéir, en tout moment. Isaac a suivi la même façon d’agir de son père. Quand il le lie et le dépose sur le bois pour le sacrifier, il ne dit rien, et il obéit. Même s’il n’a pas été sacrifié physiquement, il annonce la figure de Jésus qui, selon le commandement reçu de son Père, se fera obéissant jusqu’à la mort, et à la mort sur une croix. Jésus n’a pas emmené tous les disciples sur la montagne, mais seulement trois d’entre eux, Pierre Jacques et Jean qui, de façons différentes mais vraiment directes, seront les trois plus grands témoins de sa passion et de sa résurrection. Devant eux, il apparaît dans une forme transfigurée, montrant ainsi qu’il est plus que ce qu’ils voient de lui chaque jour, lui qui est destiné à être transfiguré après sa résurrection. Mais ce n’est pas tout. Il n’apparaît pas seul, il est avec Moïse et Elie, qui sont pour nous un symbole à trois dimensions. Moïse, qui est connu comme le législateur, et donc le représentant de la Loi. Elie est le grand prophète qui représente toute la lignée des prophètes. Tous les deux, qui sont déjà morts, représentent donc tous les morts. Ils sont morts, et pourtant ils sont présents avec Jésus. Puisqu’ils sont vivants au-delà de la mort, leur présence annonce donc la résurrection. Dans leur entretien avec Jésus, ils parlent de ce qui va lui arriver à Jérusalem. Ces deux grands géants de notre histoire du salut annoncent donc Jésus, celui qui par sa passion et sa résurrection, deviendra le plus grand législateur et le plus grand des prophètes. Pendant qu’ils parlent, une nuée les couvre tous de son ombre. Comme au baptême, une voix se fait entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le ». Là-bas, cette parole s’adressait directement à Jésus, alors qu’ici le Père s’adresse directement à chacun et à chacune d’entre nous. Il ne s’agit pas seulement de reconnaître théoriquement Jésus comme Fils de Dieu et comme Messie, mais il s’agit de nous engager personnellement et concrètement en prenant nous aussi la voie que lui, Jésus, a suivi : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en toi j’ai mis tout mon amour », ce qui confirme sa nature de Fils de Dieu et le place au-dessus de tous ceux qui sont venus avant lui. Jésus occupe donc une place de choix et unique au sein de la Trinité et au sein de notre histoire. Toutefois, son mystère et sa mission ne trouvent leur sens que dans la volonté du Père. Ce que Pierre avait dit au sujet de Jésus et rejoint les paroles du Père, c’est la vérité sur Jésus. Mais la conception de Jésus, Fils et Messie, qu’avaient Pierre, les autres disciples ainsi que la plupart des Juifs était très différente de celle de Dieu et de Jésus. Pour les Juifs, le Messie serait quelqu’un de fort, d’invincible qui viendrait pour libérer Israël. Le Messie selon Dieu et aussi selon Jésus est au contraire un Messie humble, qui doit passer par la passion et la mort avant d’entrer dans la gloire de la résurrection : « Le Fils de l’homme doit souffrir beaucoup, être rejeté par les anciens, les chefs des prêtres et les scribes, être tué et, après trois jours ressusciter »(Mc 8, 31). Les apôtres ont eu beaucoup de mal à accepter cette nouvelle conception du Messie. Pour les aider à la comprendre et à l’accepter, Jésus impose la loi du silence, à eux et aux autres, pour qu’ils ne parlent pas d’un Messie qui n’est pas selon la pensée de Dieu. Il a déjà fait plusieurs fois cette injonction au silence. Pour la dernière fois il la fait ici après la transfiguration et les disciples respecteront cette interdiction, car c’est seulement après la passion et la résurrection qu’ils comprendront et recevront officiellement la mission d’aller le proclamer à toute les nations.
Si nous réfléchissons bien, nous nous rendrons compte que nous ne sommes pas très différents des disciples qui ont eu du mal à comprendre et à accepter un Messie selon la volonté de Dieu. La preuve de cela est la manière dont nous acceptons et accueillons la souffrance, les épreuves et la maladie dans notre vie et dans notre monde. Et pourtant, nous sommes ici devant le mystère de Dieu, de l’amour, du mal du péché et de la mort qui s’insère entièrement dans le plan de salut de Dieu en Jésus-Christ. Oui, nous sommes ici, devant le mystère en face duquel la seule chose que nous avons à faire est de croire fermement en lui qui nous conduit sûrement - si nous lui restons fidèles - à la gloire, à la vie et au bonheur éternels : « Ecoutons-le ». C’est parce qu’il nous aime que le Père nous a envoyé son Fils en rançon pour nos péchés. Et c’est par amour pour son Père et pour nous que Jésus a accepter le plan de salut voulu par le Père, et qui devait passer par la passion, la mort et la résurrection : « Il fallait que le Christ supportât ces souffrances pour entrer dans sa gloire » (Lc 24, 26).
Jésus a fait aux disciples le don de la transfiguration peu avant sa passion. La passion, ce moment de grande épreuve pendant lequel tous les disciples se sont enfui, à l’exception de Jean qui l’a suivi jusqu’au calvaire, et de Pierre qui l’a suivi pendant un temps, l’a abandonné et s’est repenti par la suite. La transfiguration est un message lancé aux trois disciples et, par eux, à nous tous. Elle illustre la divinité de Jésus, Messie et Fils de Dieu et nous invite à croire en lui et à mettre notre confiance en lui, même quand il sera défiguré par la passion et la mort. Après la mort il montrera sa puissance en ressuscitant et en se montrant. Jésus est notre Maître et nous avons accepté de le suivre. Acceptons donc, comme lui, le chemin que nous trace le Père, même quand il passe par les épreuves de toutes sortes. Poursuivons donc notre marche vers Pâques, les yeux fixés sur Jésus notre Sauveur, qui passera par sa passion pour nous sauver. Continuons avec courage le chemin de la vie, même si nous rencontrons des difficultés de toutes sortes, sachant bien que le terme de tout cela c’est la gloire finale de la résurrection en Jésus et par Jésus. Que Jésus nous garde fidèles à cette foi en lui.
Mgr Bernard NSAYI Évêque émérite de Nkayi |