Jésus parle du temple de son corps

 

Jésus parle du temple de son corps (3e Dimanche de carême – Année B)

Textes : Ex 20, 1-176 ; Ps 41, 8-11 ; 1Co 1, 22-25 ; Jn 2, 13-25

Dimanche dernier, Jésus, par le miracle de la transfiguration de son corps, nous a montré sa vraie nature et le but final de sa mission à travers sa passion, sa mort et sa résurrection. En ce troisième dimanche, dans le temple même de Jérusalem, il précise encore mieux cet objectif, qui se réalisera dans le cadre de la Pâque des Juifs.

Dans le contexte général de toute la bible, la Pâque signifie « passage », passage de l’esclavage à la liberté, de la mort à la vie avec la Mer Rouge, de la servitude à la louange avec le don du décalogue par lequel le peuple peut rendre au Seigneur un culte digne de lui. Et le tout trouve son  résumé et son couronnement définitif dans la passion, la mort et la résurrection de Jésus par laquelle il nous libère du mal, de la mort et du péché. Les premières paroles de la première lecture montrent bien dès le départ, cette orientation libératrice fondamentale qui a le fondement dans le Seigneur : « Je suis le Seigneur ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays de l’Egypte, de la maison  d’esclavage ». Ces paroles sont la clé de la compréhension de toute la Bible et de tous les commandements qui suivent. Mettre en pratique les commandements, c’est donc faire honneur, c’est obéir au Seigneur qui nous les a donnés pour notre libération totale.  C’est en suivant ses commandements, dans leur totalité, que nous montrons notre amour pour Dieu, entretenant toujours une relation filiale régulière  avec lui. Nous courons toujours le risque de nous arrêter aux premiers commandements qui concernent directement Dieu et d’oublier la deuxième partie qui concerne nos relations avec les autres hommes nos frères : « Celui qui a de quoi vivre en ce monde, s’il voit son  frère dans le besoin sans se laisser attendrir,   comment l’amour de Dieu pourrait-il demeurer en lui? » (Cf. 1Jn 3,17) «Si quelqu’un dit : «J’aime Dieu » alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’amer Dieu, qu’il ne voit pas » (Cf. 1Jn 4,20).

Hier, comme aujourd’hui encore plus, le monde est caractérisé par la pluralité mixte des peules et des cultures.  Et chaque culture a sa philosophie, sa façon  de penser et de vivre. L’apôtre Paul synthétise cela de façon admirable en parlant du monde juif et du monde grec qui, avaient évidemment des modes de penser et de vivre très différents. Jésus, « Messie crucifié », était un « scandale pour les Juifs » et une « folie pour les grecs », parce qu’il était synonyme de faiblesse, d’humiliation, de souffrances et d’échec. Et pourtant  c’est lui, et lui seul qui est le véritable Messie, l’unique Sauveur de tous les hommes, par ses souffrances,  par son sang versé sur la croix. Mais nous aujourd’hui, de quel côté nous situons-nous, du côté des Juifs ou du côté des Grecs ? A chacun et à chacune d’entre nous de répondre. Il me semble que nous nous situons tous des deux côtés.

Ecoutons maintenant l’Evangile qui nous invite à prendre, nous aussi, avec Jésus, le chemin de   la Pâque. Avec lui, nous sommes à Jérusalem. Au cœur  même du monde religieux juif, c’est à-dire le temple – lieu de la prière et de la parole de Dieu – où Jésus découvre ce qui s’y passe et qui ne correspond pas à la véritable destination de ce lieu de culte. Le monde des affaires et de l’argent s’y est introduit peu à peu de façon exagérée et en a fait presque un  lieu de commerce. Dans son indignation, Jésus chasse brutalement ceux qui s’y sont installés et qui n’y sont pas vraiment pour  la prière, même si ceux qu’il chasse avaient l’autorisation des chefs religieux. Voilà pourquoi ces derniers s’indignent et demandent à Jésus de justifier ce qu’il fait. Jésus  ne répond pas exactement à la demande des Juifs, mais il y répond de manière globale et inclusive  qui nous demande d’aller plus loin : le temple, la personne même de Jésus et nous-mêmes. Le temple existait bien et, après quarante six ans de dur labeur, c’était une très belle réalisation du peuple juif qui poussait à l’admiration. Mais comme le peuple  n’était plus fidèle à la loi de Dieu et ne respectait plus la destination de ce lieu sacré, Jésus en annoncera la destruction : « De ce que vous admirez, il ne restera pas pierre sur pierre, tout sera détruit ». Désormais, le nouveau et le véritable temple de Dieu, ce sera Jésus lui-même. De même qu’il sera détruit effectivement parce qu’il sera mis a mort, de même, par la suite, le temple le sera aussi. Mais alors que le temple de Jérusalem n’a jamais été reconstruit, le véritable temple qu’est le corps même de Jésus, sera détruit, mis à mort, mais lui  il sera relevé : « Détruisez ce temple, et en trois jours, je le relèverai ». Voilà comment Jésus se présente de nouveau, comme temple nouveau et annonce sa passion, mort et résurrection. Aux Juifs qui attendaient des signes, Jésus profita, un jour, d’une de leur demande pour annoncer sa passion  et résurrection et  les inviter à la conversion : « A cette génération, il ne sera donné aucun signe, sinon celui de Jonas. Car de même que Jonas est resté trois jours et trois nuit dans le ventre de la mer, ainsi le Fils de l’homme restera trois jours et trois nuits dans le ventre de la terre » (Cf. Mt 12,40-41).

Jésus, Seigneur comme son Père, reprendra les commandements de Dieu sans rien retrancher, mais il le fera d’une façon nouvelle comme nous pouvons le lire en Lc 18,19-20. Un  passage dans lequel Jésus souligne à la fois l’importance de la vocation qu’il nous montre et aussi le danger des richesses qui risquent de nous éloigner  de Dieu et des autres. Danger des richesses et de l’argent comme nous le suggère notre évangile. Ce danger est toujours présent en nous, dans notre société, dans notre monde et même dans l’Eglise. Tout au long de ce carême, pour vraiment progresser dans la connaissance de Jésus Christ, pour retrouver le vrai sens de notre vocation de chrétiens, méditons bien les paroles de ce dimanche. Acceptons Jésus comme le nouveau temple de Dieu et avouons humblement à Dieu notre faiblesse et notre péché. Rappelons-nous toujours que depuis notre baptême, nous faisons partie du corps du Christ, nous sommes nous aussi temple de la Sainte Trinité. Demandons à Dieu la force nécessaire pour que cela devienne vraiment réalité dans notre vie concrète de tous les jours. Respectons mieux, dès aujourd’hui nos églises, dans lesquels Jésus est présent dans le tabernacle. Considérons-les comme les lieux de la parole de Dieu et de la prière. Que chacun  de nous, nourri régulièrement de la parole de Dieu, de la prière et des sacrements, soit un véritable temple de Dieu.

Que tous et toutes celles qui nous rencontrent puissent trouver, par nous, le chemin de Jésus. Avec Jésus, nous sommes déjà morts et ressuscités et nous sommes appelés à ressusciter, mais montrons-le concrètement en améliorant notre relation à Dieu et aux autres. C’est seulement de cette façon que nous serons des acteurs dans la rénovation de notre vie, de notre société e t de  nos différentes cultures, en suivant Jésus. Car il est venu nous faire passer de l’ancienne Pâque, la Pâque des Juifs, à la Pâque nouvelle et définitive, instituée par sa passion, sa mort et sa résurrection.

Mgr Bernard NSAYI

Evêque émérite de Nkayi