Mangeons notre Pâque |
Mangeons notre Pâque (Dimanche du Saint-Sacrement – Année B) Textes liturgiques : Ex. 24, 3-8 ; Ps. 115 (116 B) ; Héb. 9, 11-15 ; Mc 14, 12-16. 22-26 Il est loin, derrière nous, le temps des processions fastueuses où les chrétiens marchaient dans les rues de nos villes ou les chemins de nos villages, accompagnant, avec une piété bien extériorisée, l’ostensoir contenant le Saint -Sacrement de l’Eucharistie que portait le prêtre et avec lequel il bénissait les fidèles. Mais si, de nos jours, la célébration de cette solennité est plus sobre, pour autant elle n’a pas perdu son sens spirituel véritable, peut-être même que celui-ci a gagné en profondeur car nous découvrons que c’est à un repas de vie en plénitude que Dieu nous invite en mangeant le pain de la Pâque nouvelle : « Heureux les invités au repas du Seigneur ; voici l’Agneau de Dieu qui enlève les péchés du monde », dit le prêtre, pour introduire à la communion eucharistique. Manger pour avoir la Vie L’évangile de ce dimanche met un accent particulier sur le fait de manger et de partager un repas. Au départ, les disciples de Jésus inscrivent ce repas dans le cadre de la Pâque juive qui est la commémoration de la fin de l’esclavage que faisait peser Pharaon sur le peuple d’Israël. C’était cela la Pâque, le passage d’une vie d’esclave à la liberté, grâce à l’action de Dieu. Mais cette Pâque que Jésus mange avec ses disciples revêt, à l’évidence, un sens nouveau : l’agneau pascal dont le sang imprégné sur les linteaux de leurs demeures avait délivré les Israélites de la mort, n’est plus au centre repas ; ce sont le pain et le vin que Jésus, après avoir prononcé la bénédiction et rendu grâce, met au centre de son dernier repas avec ses disciples, avant sa mort. Ce pain et ce vin, il les présente comme son corps et son sang, c’est-à-dire lui-même : « Ceci est mon corps…Ceci est mon sang ». Il est là, présent, pour celui qui a la foi et qui prend au sérieux les paroles et l’enseignement du Christ. L’apôtre Jean, développe longuement cet enseignement dans le discours sur le Pain de vie au cours duquel Jésus insiste sur le fait que son corps et son sang sont vraie nourriture et vraie boisson pour la vie éternelle. Aller à la messe et recevoir le pain et le vin consacrés ne sont donc pas une simple évocation de la Cène, mais une réelle communion au Christ vivant et présent dans ces réalités matérielles que la puissance de l’Esprit transforme pour le croyant en véritable nourriture spirituelle : l’Agneau pascal, le Christ, qui ne cesse de se donner pour que la multitude des hommes ait la vie. La nouvelle Alliance Alors que le sang de l’agneau assurait pour les Hébreux leur délivrance à eux uniquement, et que le sang des animaux immolés au Seigneur par Moïse ne concluait l’alliance qu’entre Dieu et les douze tribus d’Israël, le sacrifice du Christ sur la croix dont nous faisons mémoire dans chaque célébration eucharistique établit une alliance entre Dieu et la multitude : « Ceci est mon sang, le sang de l’Alliance, versé pour la multitude ». Jésus pour qui les barrières de race, de culture et de religion n’existent pas, élargit ainsi le salut et la libération au-delà des enfants d’Israël ; c’est pour chaque être humain, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, qu’il livre sa vie. Cela veut dire clairement que quand nous célébrons l’Eucharistie, les bienfaits du sacrifice du Christ ne vont pas seulement à notre assemblée et à ceux qui approchent de la table eucharistique. Dieu qui est plus grand que notre cœur et notre justice humaine sait, dans son amour et sa puissance, soutenir ceux qui mettent en lui leur espoir. Et qui est digne de s’approcher du Seigneur ? Seulement l’homme qui reconnaît sa petitesse, ses péchés, comme le publicain qui se tenait au fond du temple et qui priait ainsi : « Seigneur, prends pitié du pécheur que je suis (Lc 18, 9-14)». C’est également l’essence de la prière de tout chrétien avant de communier au corps du Christ : « Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri ». En ce jour de fête consacré au Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Christ, Jésus dont nous célébrons la mort et la résurrection nous envoie pour être, à sa suite, les signes de l’Alliance nouvelle qu’il établit entre Dieu et l’humanité. Pour cela, il nous faut du cœur et de l’intelligence pour que nous sortions de nos belles célébrations et que nous allions concrètement au cœur des périphéries, là où les gens se croient à tort ou à raison rejetés ; il nous revient, disciples du Christ aujourd’hui, de susciter en eux la joie de vivre et de croire. Abbé Olivier MASSAMBA-LOUBELO
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