La lectio divina |
La lectio divina : une pratique quotidienne de lecture et de méditation de la Parole de Dieu
Cette année, l’Eglise catholique qui est au Congo célèbre les 125 ans de son évangélisation. Notre Eglise famille de Dieu, bien que jeune, commence à donner ses fruits de sainteté, d’engagement social, signe d’un enracinement réel de la foi dans cette terre. L’heure est au bilan et aux perspectives d’avenir. Cependant, celui-ci ne saurait être imaginé, sans retrouver la place de la Parole de Dieu dans la vie individuelle et collective. En ce qui nous concerne, nous aurions voulu tout simplement proposer cette réflexion sur la lectio divina. En fait, beaucoup de raisons nous y poussent. La première est le fait que la Parole de Dieu est fondamentale pour notre vie. Le 2ème Concile du Vatican, et beaucoup d’autres instances du magistère, nous l’ont rappelé. En ce mois de juin, à Dar es Salam, en Tanzanie, s’est tenue l’assemblée générale de la Fédération des Biblistes Catholiques (FBC). En octobre prochain se tiendra, au Vatican, un Synode des Evêques sur la Parole de Dieu. Mais nous ne voudrions pas oublier toutes les motivations internes à notre société et à notre Eglise locale qui nous exigent de redécouvrir la place de la Parole de Dieu dans notre vie.
Ce que nous voulons proposer comme pratique de lecture de la Bible, c’est la lectio divina. Mais qu’est-ce que c’est ? En fait de méthode, il s’agit d’une pratique déjà bien attestée dans la tradition de l’Eglise. Le Moyen Age est une période où la Bible est beaucoup lue. Dans les monastères, chacun en détenait une copie. La quantité de manuscrits qui est parvenue jusqu’à nous en donne la preuve. L’invention de l’imprimerie montre aussi que la lecture de la Bible était très fréquente au début de la Renaissance, par exemple. C’est avec la réforme protestante que l’Eglise catholique se ferme presque à la lecture individuelle de la Bible et la fait régir par une discipline sévère. Le concile Vatican II marquera une période d’heureuse ouverture en faveur de la Bible. Il prendra, en effet, des dispositions de sorte que la lecture approfondie de la Bible est requise aussi aux catéchistes, donc aux laïcs, non seulement aux clercs et aux membres des instituts religieux[1].
Voici comment la Commission Pontificale Biblique présente cette lecture approfondie de la Bible : « La Lectio Divina est une lecture, individuelle ou communautaire, d’un passage plus ou moins long de l’Ecriture accueillie comme Parole de Dieu et se développant sous la motion de l’Esprit en méditation, prière et contemplation »[2]. La lectio divina est composée donc d’au moins trois moments : la lecture, la méditation et la contemplation. Chaque étape engage profondément la totalité de notre personne, en tant que nous sommes corps, esprit et âme. Il s’agit avant tout d’une lecture de la Parole de Dieu. Cette lecture, faite dans la foi, conduit à la méditation pour devenir prière. « La méditation met en œuvre la pensée, l’imagination, l’émotion et le désir »[3]. Elle fait appel à ce que nous sommes : des êtres humains en quête de Dieu. Ce mouvement nous porte à l’approfondissement des convictions de la foi, suscite en nous la conversion du cœur et fortifie notre décision à suivre le Seigneur. Cette méditation s’applique sur la vie du Christ, comme nous la présente le texte biblique à lire, et sur notre rapport à elle. Une telle pratique au cœur de la prière chrétienne tend à la connaissance amoureuse de Jésus et à l’union avec lui.
Son histoire pourrait remonter déjà à la pratique d’Origène (IIIème siècle. après J.C.). La vie monastique en a fait un usage quotidien, surtout en ce qui concerne l’aspect individuel. Actuellement, la pratique revient avec beaucoup de force ; beaucoup de communautés ecclésiales la vivent. Le mérite revient, bien évidemment, au Concile Vatican II qui a ouvert largement l’accès aux Saintes Ecritures à tout le Peuple de Dieu. Il faut donc savoir profiter de cet outil traditionnel qui a nourri des générations entières de chrétiens. Cette pratique a un avantage, celui d’être enracinée dans la liturgie, comme le reconnaît le Catéchisme de l’Eglise Catholique qui la présente comme prolongement de la Liturgie des Heures qui est, à son tour, une sorte de prolongement de l’Eucharistie[4]. Elle reflète bien le visage de la prière chrétienne qui s’applique, de manière excellente, à méditer les « mystères du Christ »[5].
L’accent sur cette méthode résulte du fait de sa double caractéristique, c’est-à-dire individuelle et personnelle. Il appert que plus on apprend ensemble à lire la Parole de Dieu, plus on s’habitue seul à la fréquenter. Ainsi, petit à petit, on peut faire entrer jusque dans la vie familiale une pratique hautement chrétienne, celle de la lecture de la Bible. « Le but recherché est de susciter et d’alimenter “un amour effectif et constant” de la Sainte Ecriture, source de vie intérieure et de fécondité apostolique (…), de favoriser aussi une meilleure intelligence de la liturgie et d’assurer à la Bible une place plus importante dans les études théologiques et dans la prière »[6].
C’est tout simplement un défi qui est lancé à notre Eglise Famille de Dieu qui est au Congo. Celle-ci sera ce que nous en ferons, mais n’arrivera à sa pleine maturité que si nous intégrons dans notre action quotidienne, et plus encore dans notre « être Eglise », la centralité de la Parole de Dieu. Ainsi une pastorale biblique devient encore plus qu’une urgence. C’est un impératif qui fera porter à notre jeune Eglise ses fruits de sainteté et de maturité chrétienne ; une Eglise toujours ouverte et attentive à « ce que dit l’Esprit aux Eglises » (Ap 2-3).
Ildevert Mathurin MOUANGA [1] Cf. L. Monloubou – F. M. Du Buit, Dictionnaire biblique. Universel, Desclée, Paris 1984, 418. [2] Commission Biblique Pontificale, L’interprétation de la Bible dans l’Eglise, 111. [3] Jean Paul II, Catéchisme de l’Eglise Catholique (11 0ctobre 1992), n. 2708. [4] Ibidem, n. 1177-1178. [5] Ibidem, n. 2708. [6] Commission Biblique Pontificale, L’interprétation de la Bible dans l’Eglise, 111. |