Jésus est venu pour nourrir tous les hommes

 

Jésus est venu pour nourrir tous les hommes (18ème dimanche du temps ordinaire - Année A)

 

 

Texte 1 : Is 55, 1-3 = Venez et mangez sans argent

 

Ce passage du deutéro-Isaïe, le livre de la consolation,  se situe dans le contexte de l’exil. Il vise à donner espoir à un  peuple éprouvé par toutes sortes de difficultés, dont la faim.

Le verset 1 est un appel adressé à tous ceux qui sont assoiffés, une invitation à venir vers les eaux. La même idée est reprise, cette fois au singulier, pour préciser que même celui qui n’a pas d’argent peut venir. Dans la deuxième partie du verset, la même insistance revient mais avec plus de précision. Le verbe « venez » revient deux fois, renforcé par les verbes « demandez », « mangez », « buvez ». Une autre insistance « sans argent, sans paiement. » Il ne s’agit pas simplement de l’eau, mais aussi du vin et du lait. Ce sont là des symboles du festin messianique.

 

Au verset 2, nous apprenons que ceux qui sont invités ne sont pas nécessairement dépourvus d’argent. Pas un argent facile, mais un argent qui est le fruit de leur labeur. Il leur est conseillé de ne pas dépenser cet argent pour ce qui ne nourrit pas. Dans la deuxième partie du verset, la répétition de « écoutez », appuyé par le verbe « mangez  ce qui est bon…, les mets savoureux, nous oriente vers l’écoute de la parole de Dieu.

 

Le verset 3 confirme bien qu’il s’agit d’écouter la parole de Dieu pour avoir la vie, pour vivre. De façon solennelle, la deuxième partie met Dieu au devant de la scène, en deux temps :

- je conclurai pour vous une alliance éternelle

- je maintiendrai les bienfaits de David.

Du présent, de la situation concrète que vit le peuple (versets 1-2), nous sommes passés au futur (verset 3b), dont la solidité réside dans la fidélité de Dieu qui s’est manifestée par les  bienfaits accordés à David, dans le passé.

 

Texte 2 : Psaume 144

Disons notre profonde reconnaissance à celui dont parle le psalmiste quand il dit :

« Tu ouvres ta main : tu rassasies avec bonté tout ce qui vit » (Mfumu Nzambi, ni lungi kiani, kima kani kilenda nkondo, zingu kiani gha moko mandi kie)

 

 

Texte 3 : Rm 8, 35-39 : Rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu

C’est une véritable profession de foi que l’apôtre Paul nous présente dans ces lignes travaillées avec un soin tout particulier. Dans la cascade d’éléments énumérés ici, l’accent est à mettre sur le premier et le dernier, c’est-à-dire :

-         qui nous séparera de l’amour du Christ ?

-         le glaive ?

Le premier montre que nous avons à faire aux ennemis de l’évangile. Le dernier indique un des aspects qui risquent de nous faire chanceler, puisqu’il s’agit en fait d’un instrument de mort.

 

Dans les versets 37-38, la profession de foi continue, d’une autre manière, mais toujours  avec une attention particulière sur le premier et le dernier élément :

-         Mais en tout cela, nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés.

-         Rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur.

En réalité, la base de toute l’argumentation de Paul, c’est l’amour du Christ, ou en d’autres termes, l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ.

 

Texte 4 : Mt 14, 13-21 = Jésus est venu pour nourrir tous les hommes

 

Il est nécessaire de tenir compte du contexte dans le quel Matthieu situe ce passage. Aux versets 1-12, il est question de Jean Baptiste qu’Hérode a fait décapiter dans sa prison. Informés, ses disciples viennent et l’ensevelissent. Un temps viendra où Jésus vivra lui aussi le martyre, et des disciples viendront prendre son corps pour l’ensevelir. C’est pourquoi, ici, comme son heure n’est pas encore venue, apprenant la nouvelle de la mort de Jean Baptiste, Jésus s’éloigne de là et va dans un endroit désert. De leur côté, les foules, apprenant que Jésus s’est éloigné, le suivent, à pied (verset 13).

 

Quand Jésus, qui pensait s’isoler sort, il voit  les foules devant lui. Une fois de plus, il se rend compte que ces foules ont besoin de lui. Tout son être réagit : il éprouve de la  compassion pour cette foule, et il guérit leurs infirmes (verset 14). Il faut bien noter la manière dont est structuré ce verset. Trois verbes sont mis en exergue, leur centre est que Jésus « éprouve de la compassion ». Cette expression, qui revient de temps en temps dans l’évangile, est capitale : elle montre la véracité du fait que Jésus s’est vraiment fait homme. Il n’est jamais indifférent devant les problèmes des hommes. C’est également le signe de son amour qui le pousse à guérir et, plus loin, à réaliser le miracle de la multiplication des pains et des poissons.

 

Le verset 15 peut être divisé en quatre parties. 15a constitue l’introduction du récit. Il commence par l’indication du temps et du mouvement des disciples qui se rapprochent de Jésus pour une requête. 15b commence le dialogue avec l’indication du lieu qui est un désert, où il n’y a rien. La deuxième indication revient sur le temps, le moment de la journée que Jésus renvoie les foules. 15c constitue le noyau de la requête : « Renvoie les foules ». 15d présente le but de la requête : « pour qu’ils aillent dans les villages s’acheter de la nourriture ».

 

Nous pouvons noter que le temps est important ici : c’est le soir, un peu comme avec les disciples d’Emmaüs. Les gens ont marché. Ils doivent être fatigués, et ils ont faim. La requête des disciples est vraiment justifiée. Mais ce n’est pas sûr que les gens qu’ils veulent renvoyer dans les villages, ont de quoi faire des achats pour leur nourriture, nourriture matérielle.

 

La première réponse de Jésus se fait en deux temps. D’abord une opposition à la requête des disciples : « Les foules n’ont pas besoin de s’en aller » (verset 16a). Ensuite un ordre positif : « Donnez-leur vous-mêmes à manger » (verset 16b). Il s’agit de la nourriture corporelle. Cette double réponse est vraiment étonnante. On ne voit pas pourquoi il refuse une requête aussi pertinente et pourquoi il donne un ordre que concrètement les disciples ne peuvent pas réaliser.

 

Les disciples réagissent en appuyant le bien-fondé de leur requête : ils n’ont que cinq pains et deux poissons. Ce qui est ridicule pour tant de foules (verset 17). Pourtant, Jésus demande de les lui apporter (verset 18). Aux foules, il ordonne de s’asseoir sur l’herbe. Il prend les pains et les poissons. Après avoir levé les yeux au ciel (vers le Père), il bénit. Et, après les avoir rompus, il les donne aux apôtres et les apôtres aux foules (verset 19). Il les nourrit tous, et il en reste 12 (verset 20). Dans ce miracle, tous sont impliqués : les foules qui le suivent et obéissent, les disciples qui ont déjà quelque chose et qui obéissent et enfin, au centre, le Père qui exauce son Fils, et à qui le Fils rend grâce. Il s’agit aussi de la nourriture spirituelle (cf. Mt 26, 26 ; Lc 24, 30)

 

Dans ce récit, nous voyons Jésus, vrai Dieu et vrai homme, qui a compassion pour les foules. Il nourrit les foules comme le Père a nourri son peuple au désert. Pour le faire, il a pris le peu que les disciples avaient. Aujourd’hui aussi, par nous, dans son Eglise (douze disciples), Jésus nourrit les foules par sa présence, par sa parole et par les sacrements (5 + 2=7), mais aussi par la charité, la justice et la solidarité de ceux qui ont de la compassion.

 

 

         +Mgr Bernard NSAYI

         Evêque émérite de Nkayi